Ambitions mondiales

Agiles et puissantes, les Cobra sont désormais devenues difficiles à battre aux Etats Unis. Toutefois, les rares confrontations internationales n'ont que rarement tourné en sa faveur. Battre des Corvette sur des petits circuits tourmentés, c'est une chose. Prendre le meilleur sur des Ferrari GTO sur de grands tracés rapides, en est une autre. Carroll Shelby a d'ailleurs bien trop de métier pour se bercer d'illusions. "Il faut aller plus vite, c'est la clef de tout". La carrosserie profilée comme une "boîte à chaussures" des roadsters impose rapidement ses limites et la solution du problème sera radicale: transformer le roadster en un coupé plus fluide.

C'est en octobre 1963 que le projet est arrêté et la saison suivante s'ouvre en février à Daytona. Le temps presse d'autant que Shelby, ne peut délèguer que trois hommes sur le "chantier": Pete Brock, réalise le dessin de la carrosserie, Ken Miles, le pilote d'essais, s'occupe de la partie châssis et John Ohlsen, le mécanicien néo-zélandais de l'équipe, se charge de l'assemblage. Les premiers essais à Riverside confirment immédiatement d'indéniables gains dynamiques: vitesse de pointe supérieure, stabilité accrue en virage et consommation réduite de 20 % Peint d'un bleu-pâle métallisé, le coupé effectue quelques jours plus tard ses débuts à Daytona. En dépit d'un cockpit transformé en véritable étuve, Bob Holbert et Dave McDonald se montrent intouchables en début de course. Partis de la pole position, ils possèdent, cinq tours d'avance sur la première Ferrari dès le huitième tour ! Lors du premier ravitaillement tout s'effondre. De l'essence refoule du réservoir et s'enflamme au contact des échappements latéraux. L'incendie est vite maîtrisé, mais la voiture trop endommagée ne peut poursuivre sa ronde.

La démonstration plus que convaincante lui vaut toutefois de trouver son nom de baptême: Coupé Daytona. La Daytona ne va d'ailleurs pas tarder à prendre sa revanche. A Sebring, elle prend la 4e place au général derrière trois prototypes Ferrari et s'impose en GT devant deux Roadsters 289. Fort de ce succès et soutenu par Ford qui dans le même temps part à la conquète du Mans avec sa GT 40, Shelby décide de disputer l'ensemble du Championnat du Monde des constructeurs. Dès cet instant, la folie gagne la nouvelle usine Shelby de Los Angeles. On travaille jour et nuit pour construire trois nouveaux coupés, adapter cinq roadsters aux normes FIA (grand pare-brise, coffre à bagages), produire une dizaine de roadsters "lightweight" pour l'USRRC, préparer une demie douzaine de King Cobra (des barquettes Cooper à moteur Ford) et enfin développer la monstrueuse 427 (7 litres) qui vient juste de débuter à Sebring ! Shelby et sa bande de "cow boys" vont non seulement tenir les délais, poursuivre leur razzia aux Etats Unis, mais aussi bousculer Ferrari sur son terrain de chasse favori.

Après des débuts épiques à la Targa Florio, où les roadsters focalisent la curiosité et provoquent encore plus de sympathie que d'inquètude chez les tifosi, les choses sérieuses commencent à Spa. Phil Hill au volant du Coupé se montre plus que menaçant pour les Ferrari en signant la pole et le meilleur tour en course. La Daytona est bien la GT la plus rapide du moment et un mois plus tard, elle fait preuve de son endurance en terminant 4e et 1ere en GT aux 24 Heures du Mans. Avec un nouveau succès au Tourist Trophy à Goodwood, les Cobra talonnent désormais les Ferrari au championnat. L'annulation aussi soudaine qu'arbitraire-représailles de Fédération italienne contre la FIA qui a refusé l'homologation de la Ferrari 250 LM en GT-de l'épreuve de Monza, dont le tracé semblait taillé sur mesure pour la Daytona va briser l'élan de l'écurie américaine. Malgré une incroyable razzia-6 Cobra aux 6 premières places en GT-à Bridgehampton, le titre s'envole pour une poignée de points. Furieux de ce coup tordu, Shelby et toute son équipe a soif de revanche.

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