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L'ex patron de Volkswagen ne serait ni responsable ni coupable du dieselgate

Dans Economie / Politique / Personnalités

Michel Holtz

Depuis la semaine passée, et 9 ans après le dieselgate, le PDG du groupe Volkswagen d'alors, Martin Winterkorn, comparait devant le tribunal de Brunswick en Allemagne. Mais l'homme nie toute responsabilité. Il risque dix ans de prison à l'issue de ce procès-fleuve.

L'ex patron de Volkswagen ne serait ni responsable ni coupable du dieselgate

Martin Winterkorn, patron du groupe Volkswagen au moment du dieselgate. Crédit photo : Moritz Frankenberg/dpa/picture-alliance/Newscom/MaxPPP

 

En principe, le plus haut gradé d’une armée est responsable de ses troupes et de leurs actions. Pas dans la beaucoup moins belliqueuse industrie automobile, du moins pas chez Volkswagen. La preuve par Martin Winterkorn qui comparait depuis une semaine devant le tribunal de Brunswick en Allemagne dans le cadre d’un procès destiné à sceller une fois pour toutes l’affaire du dieselgate.

L’homme, aujourd’hui âgé de 77 ans, est accusé de « fraude en bande organisée », de « faux témoignage devant une commission parlementaire » et de « manipulation des marchés ». Un sacré dossier judiciaire pour lequel il risque dix ans de prison, 9 ans après l’affaire qui a secoué l’industrie auto, bien au-delà de Wolfsburg. 

Un champion des ventes

C’est que, entre 2007 et 2015, Winterkorn était le tout-puissant patron du groupe Volkswagen, premier employeur privé d’Allemagne. C’est l’homme qui a boosté les ventes de la maison, les a fait passer de 6,2 à 10 millions de voitures par an, a doublé les effectifs qui sont passés à plus de 600 000 salariés et a hissé VW au rang de deuxième constructeur mondial. C’est donc à un monument que s’attaque le tribunal au cours de 89 audiences prévues jusqu’au jugement qui ne devrait pas tomber avant plusieurs mois.

Car cette carrière héroïque, et son mandat à la tête du groupe, se sont arrêtés net au moment de la découverte d’une énorme tricherie en septembre 2015. Pendant 6 ans, sous sa gouvernance donc, VW et plusieurs de ses marques ont utilisé des logiciels visant à minimiser les émissions des moteurs diesel durant les phases d’homologation. Elles passaient crème les tests, mais se remettaient à polluer ensuite. Ce que Volkswagen a fini par reconnaître. Les conséquences de cette tricherie ont été énormes. Elles ont été chiffrées à une trentaine de milliards d'euros pour le géant allemand, en règlement d’amendes, en remboursement de clients plaignants et en rappels.

Mais elles ont eu une autre conséquence : celle de précipiter l’Europe vers la voiture électrique quelques années plus tard. "Enfin", ont dit certains, "trop précipitamment " selon d’autres. 

Martin Winterkorn, n'a rien vu, rien entendu et rien dit. Crédit photo : Jan Kuppert/SVEN SIMON/picture alliance / SvenSimon/Newscom/MaxPPP
Martin Winterkorn, n'a rien vu, rien entendu et rien dit. Crédit photo : Jan Kuppert/SVEN SIMON/picture alliance / SvenSimon/Newscom/MaxPPP

C’est donc cet homme qui est apparu à Brunswick la semaine passé, comme il a promis de le faire chaque semaine jusqu’à l’issue du procès. Mais à la place d’un ex-grand PDG, les juges de Basse Saxe ont cru voir apparaître devant eux les trois singes de la sagesse chinoise, ceux qui n’ont rien vu, rien entendu et rien dit. Les animaux qui, selon la légende, ne veulent pas « voir le Mal, entendre le Mal, et dire le Mal ».

Une stratégie judiciaire risquée

Était-il au courant de la création et de l’usage du logiciel farceur ? « Je n’étais pas impliqué dans les décisions concernant le développement et l'utilisation d'une fonction logicielle irrégulière sur les nouveaux moteurs diesel de Volkswagen ». Son boulot, c’était « les décisions stratégiques concernant l'orientation du groupe, de ses marques et produits » pas la tambouille technique. Et d’expliquer que, de toute façon, tout ingénieur de formation qu’il est, il n’est pas « spécialiste en informatique ». En conséquence, il rejette toutes les allégations portées contre lui.

Cette attitude qui consiste à rejeter toute responsabilité, si elle est étonnante pour le patron d’un groupe, est-elle pour autant une bonne stratégie judiciaire pour lui et ses avocats ? Rien n’est moins sûr si l’on se réfère au sort du PDG d’Audi à l’époque, Rupert Stadler, jugé à Munich l’an passé pour des motifs semblables. Il a écopé d’1,1 million d’amendes. C’est beaucoup, certes, mais il n’a été condamné qu’à de la prison avec sursis. Sauf qu’en 2023, Stadler a plaidé coupable, contrairement à Winterkorn aujourd’hui.

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