Je me fais vieux ou bien ... Rendons à nos amis suisses la paternité de l'expression énoncée ci-avant qui doit indiquer mon état d'esprit (et d'âme) après ce salon de l'auto parisien 2008. Déjà en 2004 et 2006, je n'avais que moyennement gouté la propagande anti-voiture, puante de démagogie politicienne. En 2008, c'est le message assené à coups d'enclume teintée d'un vert bien terne qui me résonne dans les tympans. Paris est le salon paradoxal. Il est le plus visité au monde et celui où l'automobile est la plus décriée.

Heureusement, les autos amusantes n'ont pas disparu, non. Les constructeurs européens ont encore assez de fonds pour tirer sur toutes les niches qui bougent mais ces produits au demeurant plaisants pour l'amateur de voitures-plaisir ne prennent pas place dans les discours et se retrouvent en dernière ligne sur la grille des évocations des commerciaux disséminés sur les stands.

Que Peugeot présente une RC qui renvoie les 407 coupé, concept Prologue et autre 308 au rang d'obèses disproportionnées et ce que l'on vous balance en premier, c'est son rejet CO2. Renault sort une Mégane 3 coupé à l'allure très sportive mais pour donner le change, on se dépêche de créer ZE que l'on place bien en avant. Et Citroën qui arrive à habiller la GT Concept d'une robe purement passionnelle nous envoie un autre message : le plaisir est désormais virtuel.

Je suis désolé mais un taux de rejet CO2, ça ne me fait pas rêver et tous les bonus du monde n'y pourront rien. Une auto est une sensation avant d'être un ratio mathématique.

Bien sûr, tout est fait depuis des années pour culpabiliser les propriétaires de voitures et les amener à la contrition, si possible avec à la clé, une (voire plusieurs) contribution absolutoire sonnante et trébuchante. Cet objet essentiel à la vie sociale mais aussi symbole d'une liberté de déplacement qui n'a pas encore trouvé d'équivalent aujourd'hui est devenu le péché majeur, celui par lequel vous risquez l'excommunication sociale, la punition divine ! Perversité ultime.

Mais je reste persuadé qu'au plus profond de la majorité des 1.400.000 visiteurs, l'automobile est encore un objet de rêve, une quête, bref, un achat un peu plus frissonnant que l'acquisition d'un épluche-légume ou d'un écran plat. Et que, sauf à la contraindre comme on le fait aujourd'hui, cette majorité se fout de savoir ce que crache sa voiture et de quelle manière elle nous trimbale. L'essentiel étant d'avoir une ligne qui plaise et des caractéristiques en adéquation avec ses aspirations (sportives, pépères, crapahuteuses, voyageuses...). Et pour les plus sportifs, l'intérêt ne doit pas être dans la motorisation mais dans ses prestations !

La conscience écologique c'est bien, mais c'est aux fabricants qu'il faut l'imposer. C'est de la responsabilité du législateur de fixer le cadre technique qui nous assure que les produits ne sont pas néfastes, c'est au constructeur de respecter ces normes mais pas à nous, clients, d'être les guides. Nous sommes les usagers, pas les précepteurs (enfin, ce devrait être comme ça si la politique faisait son boulot).

L'automobile, c'est beaucoup plus que de la technique et ramener le message commercial à un simple résultat chiffré de rejet CO2 ou à un type de moteur est aussi stupide que donner la puissance brute d'une auto ou se prosterner devant un V12. En cherchant à vider le produit de la part de subjectivité qu'il porte, en le réduisant à bien peu comparativement à tout ce qu'il nous apporte, on ne rend service à personne. De cette manière, l'industrie automobile tend à ressembler à celle des fabricants de machine à laver et si l'on ne prend pas garde à préserver l'aura de l'automobile, sa dimension transcendantale qui fait d'elle, le prolongement de notre personnalité (quelle qu'elle soit), on va vers un avenir sombre.

Aimons donc les autos.

Et personnellement, j'ai de toute façon beaucoup de mal à accepter que le prolongement de ma personnalité se résume aux émanations néfastes d'un pot d'échappement. Prout.