Commencé en 1964, le duel Ford-Ferrari atteint son apogée trois ans plus tard. Les hostilitées débutent le 4 février 1967 à Daytona. Terrassées par le rouleau compresseur Ford sur la piste du Mans quelques mois plus tôt, les Ferrari vont prendre une éclatante revanche en réalisant un formidable triplé.

À l'aube de la saison 1966, Ford affiche clairement ses ambitions. L'apprentissage de la course est terminé. Ford veut vaincre et ne lésine pas sur les moyens. Sous le prétexte de donner à leur épreuve un caractère plus prestigieux, l'état major de Detroit a réussi à convaincre les organisateurs de Daytona d'étendre la course à 24 heures. Profitant de ce super galop d'essai avant le Mans, les nouvelles Mark Il ne vont pas manquer ce premier rendez-vous.

Ford s'impose à nouveau à Sebring et décide d'engager huit Mark II au Mans. La loi du nombre, simpliste mais logique, fini par l'emporter. Ce 19 juin 1966, le duel tourne court bien avant 16 heures et Ford réalise un somptueux triplé dans la Sarthe. En trois saisons, le constructeur américain a atteint tout ses objectifs: Le Mans, le championnat du monde des prototypes et le titre mondial en sport. Tout le monde pense qu'il va se retirer, mais dans l'euphorie de la victoire mancelle, Henry Ford Il annonce qu'il remet son titre en jeu. Imprudent, passionnel et guère raisonnable. Tout au long de son histoire, la Scuderia a montré sa capacité à réagir face aux échecs. Blessée et humiliée sur ses terres, elle veut sa revanche. Dès l'automne, Ferrari affûte une nouvelle arme: la P4. Etroitement dérivée de la P3, elle perd quelques kilos superflus, troque sa capricieuse boîte ZF pour une boîte "maison", tandis que son V12 - 4 litres reçoit une culasse à 36 soupapes qui porte la puissance à 450 ch. Enfin, la Scuderia signe un contrat d'exclusivité avec Firestone qui lui procure un certain confort financier. Ainsi armé, Ferrari part pour Daytona effectuer un test d'endurance en décembre. La nouvelle P4 ne se contente pas d'être belle à couper le souffle, elle va très vite aussi. la voiture laboratoire, un spider développé à partir du châssis P3 vainqueur à Monza et Spa en 1966, pulvérise tous les records sur la piste de Floride. Alerté, chez Ford, on décide de procéder quelques jours plus tard à des tests comparatifs. Dans des conditions climatiques identiques, le verdict du chrono est impitoyable: les Mark II, lourdes et démodées, sont surclassées. Ford n'est pas à cours de ressources, mais il ne reste qu'un petit mois avant le départ des 24 heures de Daytona. Mis en sommeil depuis l'accident qui coûta la vie à Ken Miles, le programme de mise au point du nouveau prototype "J" est alors réactivité. A son volant, Mario Andretti ne sera toutefois jamais en mesure d'approcher les temps de la P4. Le prototype à châssis monocoque est encore une fois remisé et, faute de mieux, on décide de lui faire un sérieux lifting. Elle reçoit une carrosserie plus trapue, de nouveaux disques de frein, mais reste encore bien trop lourde. Pour compenser cet embonpoint, la puissance du V8-7 litres est portée à 530 ch après le montage d'un second carburateur Holley quadruple corps. Renonçant finalement à la nouvelle carrosserie, Ford décide d'engager ses six Mark Il en configuration 66. Misant encore une fois sur le nombre et sur une puissance supérieur, Ford compte refaire "le coup" du Mans en essoufflant les Ferrari. La "dream team" devra vite déchanter...

Chaparral en vedette américaine

Chez Ford, tout va mal. Seul Andretti est capable de suivre. Les autres connaissent des problèmes de surchauffe. L'augmentation de puissance sur cette voiture vieille désormais de trois ans est responsable de cette fragilité. Surclassées en vitesse pure, les Mark Il sont également pénalisées par un trop forte consommation perdent beaucoup de temps. Le coup de théâtre va survenir agrès trois heures de course. Victime d'une touchette, Phil Hill endommage sa suspension arrière. Malgré une longue réparation, la Chaparral est contrainte à l'abandon. Dès lors, plus personne ne peut plus menacer les Ferrari. II leur suffit de tenir encore 20 heures. Pendant la nuit, l'hécatombe se poursuit. Toutes les Ford sauf celles de Gurney - Foyt et de McLaren-Bianchi disparaisent sur des ennuis de boîte. Un mal d'autant plus incurable que les pièces de rechange proviennent elles aussi du même lot défectueux. Les Porsche ne font leur habituelles démonstration de groupe perdant qutre de ses six voitures. La petite Dino plus rapide que les Porsche en catégorie deux litres casse son moteur tandis que les Ferrari P3 et P2 disparaissent elles aussi après des cascades d'ennuis divers. Moteur cassé, la Ford de Gurney-Ford abandonne à son tour à huit heures du matin. La dernière voiture de McLaren - Bianchi en proie avec d'insurmontables problèmes de surchauffe terminera à vitesse réduite à 73 tours des vainqueurs... Hormis quelques petits ennuis de freins, les deux P4 tournent comme des horloges tandis que la P3/P4 était ralentie par une rupture du sélecteur de vitesses. La matinée n'en finit plus et seuls les duels opposants les Mustang aux Porsche 911 sortent les spectateurs de leur somnolence. Qu'importe. Ferrari tient sa revanche. Dans le fief de Ford, les trois voitures rouges franchissent à 15 heures l'arrivée en formation serrée. Après cette première confrontation, les deux adversaires vont soigneusement s'éviter. Ils se retrouveront seulement en juin pour la course du siècle. Devant 300 000 spectateurs, la course tiendra toutes ses promesses et même davantage... mais ceci est une autre histoire.

Classement :

1. Bandini - Amon Ferrari P4 ; 666 tours à 170 km/h de moyenne.

2. Parkes - Scarfiotti Ferrari P4 à 3 tours.

3. Rodriguez - Guichet Ferrari P3/P4 à 29 tours

4. Herrmann - Siffert Porsche 910

5. Soerry - Steinemann Porsche 906

6. Ickx - Thompson Ford GT

7. McLaren - L. Bianchi Ford MkII

Meilleur tour :

P. Hill Chaparral 2F : 1"55"7

Palmarès

1982 (3 heures) : D. Gurney Lotus 19 - Climax

1963 (3 heures) : P. Rodriguez, Ferrari 250 GTO.

1964 (2000 km) : P. Rodriguez - P. Hill, Ferrari GTO 64

1965 (2000 km) : K. Miles - L. Ruby, Ford GT 40

1966 (24 heures) : 1. K. Miles - L. Ruby Ford MkII / 2. D.Gurney - J. Grant Ford MkII / 3. W. Hansgen - M. Donehue Ford MkII / 4. P. Rodriguez - M. Andretti Ferrari 365 P2 / 5. B. McLaren - Amon Ford MkII / 6. H. Herrmann - H. Linge Porsche 906

Les principaux engagés

8 Ford Mk II : L. Bianchi - B. McLaren (1) ; R. Bucknum - F. Gardner (2) ; D. Gurney - AJ. Foyt (3) ; P. Revson - M. Donehue (4) ; M. Andretti - R. Ginther (5) ; D. Hulme - L. Ruby (6).

3 Ford GT 40 dont une préparée par John Wyer pour J. Ickx - D. Thompson (11)

2 Ferrari P4 : L. Bandini - C. Amon (23) ; M. Parkes - L. Scarfiotti (24) 2 Ferrari P3 : P. Rodriguez - J. Guichet (26) ; W. Mairesse - "Beurlys" (33) - 2 Ferrari 365 P2 : J. Schiesser - M. Gregory (28) ; D. Piper - R. Attwood (31) - 1 Dino 206 : C. Kolb - B. Fulp (34)

2 Chapparal : B. Johnson - B. Jennings type 2D (14) ; P. Hill - M. Spence type 2F (15).

1 Porsche 910 : J. Siffert - H. Herrmann (52) - 5 Porsche 906 : G. Mitter - J. Rindt (51); E. Schutz - G. Van Lennep (53) ; D. Spoerry - R. Steinemann (55) ; C. Voegele - W. Habegger (56) ; T. Taylor - T. Dean (58).

1 Chevron B6 - BMW : P. Gethin - R. Pike (47) et aussi : 1 Ferrari 275 LM, 1 Ferrari 275 GTB, 2 Porsche 911, 4 Ford Mustang, 3 Shelby 350, 1 Cobra, 1 Ford Falcon, 3 Chevrolet Camaro, 1 Plymouth Baracuda, 1 Dodge Dart, 5 Triumph TR4, 2 MG B, 4 Alfa Romeo GTA, 1 Ford Cortina Lotus, 1 ASA 1300, 1 Jaguar E, 2 Volvo 1225 et 1 Volvo P 1800.

60 engagés : 22 Sport-Prototypes, 7 Sport, 12 GT et 19 Tourisme Groupe 2/Transam.

A noter que parmi les 120 pilotes engagés, 34 ont été des pilotes de Formule 1.

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