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Le miracle de l’hydrogène sera-t-il un cauchemar ?

Pendant qu’en France une maire écolo déclenche un scandale en réduisant la subvention d’un aéroclub, que l’on débat de la viande dans les cantines et de la voiture en ville, l'Allemagne travaille à sa révolution énergétique. Vous avez aimé le pétrole ? Vous allez adorer l’hydrogène !

Le miracle de l’hydrogène sera-t-il un cauchemar ?

L’écologie ne mérite pas ça.

Ni d’être représentée par une élue assez niaise pour commenter d’un stupide « l’aérien ne doit plus faire partie des rêves d’enfants d’aujourd’hui » le légitime transfert d’une partie des subventions aux aéroclubs de sa ville vers des associations sportives asphyxiées par le Covid.

Ni d’être accusée de vouloir « interdire, punir, faire payer, freiner l’innovation, détruire les filières d’excellence industrielle comme le nucléaire et l’aéronautique, s’en prendre aux rêves des enfants… » Et pourquoi pas de les cuisiner avec du quinoa ?

On débat de broutilles, on s’amuse et pendant ce temps, on ne parle de rien.

Et surtout pas de notre plan hydrogène à 7 milliards d’euros. Plan qui suit, c’est le mot, une semaine plus tard et un cran en dessous, celui de l'Allemagne à 9 milliards.

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Le jus d’éolienne, c’est mieux que le sirop de dinosaure

L’hydrogène, je vous le fais court, c’est la nouvelle énergie miracle, le H2 de H2O, le gaz inépuisable qui se fabrique par électrolyse de l’eau, dont on remplira nos réservoirs le temps de boire un café, pour alimenter en électricité, via une pile à combustible et par le prodige de l’électrolyse inversée, les moteurs électriques de nos irremplaçables voitures, innombrables camions et indispensables avions. Et cela, en n’émettant que de la vapeur d’eau.

Un hydrogène que l’on pourra produire partout sur terre, à toute petite ou à immense échelle, avec des électrolyseurs reliés à des panneaux solaires et des éoliennes et qui permettra, en se passant de charbon, de pétrole et de gaz, de vaincre le réchauffement climatique à la force du vent et du soleil. Avouez que le jus d’éolienne, ça en jette plus que le sirop de dinosaure.

Bref, oubliez la ringarde voiture électrique à batterie, on a trouvé mieux : la voiture électrique à pile à combustible.

Et vous savez quoi, on a appris mercredi que d’ici 2050, l’hydrogène sera 85 % moins cher qu’aujourd’hui - soit à 1 $ le kilo, moins cher que la limonade ! - grâce à la baisse des coûts de l’électricité solaire.

C’est Bloomberg qui l’annonce, des gens sérieux qui ne savent pas si le prix du pétrole explosera ou s’effondrera la semaine prochaine mais qui connaissent trente ans à l’avance celui d’une énergie qui n’existe pas, l’hydrogène vert.

Le miracle de l’hydrogène sera-t-il un cauchemar ?

Car au fait, l’hydrogène d’aujourd’hui, celui que l’on utilise dans le raffinage du pétrole, la chimie, la production d’engrais, il s’obtient par cracking du méthane (CH4), en séparant les atomes H des atomes C. C’est-à-dire en rejetant dans l’atmosphère d’énormes quantités de C02, précisément 10 000 grammes de C02, soit 80 km en voiture moyenne, pour un petit kilo de « H » produit. C’est l’hydrogène gris qui, en France, représente environ 3 % des émissions de C02, plus que le vilain transport aérien.

Mais demain, promis, on le produira proprement, à partir des excédents d’électricité de nos éoliennes et de nos panneaux solaires. Vous savez, quand le soleil brille et que le vent souffle mais que ce n’est pas encore l’heure de mettre le poulet au four ou les enfants au bain.

On nous prend vraiment pour des cornichons.

 

Vers le panzer à hydrogène ?

En vérité, il ne s’agit pas de sauver la planète du réchauffement climatique mais plus trivialement d’assurer les positions économiques de l’Europe dans l’après pétrole-gaz-charbon.

Puisque l’Asie en général et la Chine en particulier ont pris trois longueurs d’avance sur les batteries, il nous faut la technologie d’après, celle qui sauvera notre autonomie économique et stratégique.

La grande Allemagne a décrété que ce serait l’hydrogène. Was sonst ? (what else ?)

Côté français, on était bien tenté par le nucléaire nouvelle génération, la sobriété énergétique, l’isolation du bâti, le renouveau du ferroviaire et autres machins sympas, mais le cousin germain a dit « nein, trop petit, on change tout ! ».

Dans ces cas-là, vous l’aurez noté, la France suit le mouvement et les voisins du Sud regardent leurs chaussures d’un air gêné.

Le miracle de l’hydrogène sera-t-il un cauchemar ?

Va donc pour le plan hydrogène, la voiture à hydrogène, le camion et l’autobus à hydrogène, l’avion à hydrogène, la moto à hydrogène et aussi, tiens, le panzer à hydrogène…

Oui, je sais, le cliché du panzer, ce n’est pas très gentil, mais je n’ai pas envie d’être gentil.

Méchant non plus, alors va pour l’ironie qui me vient spontanément pour décrire les prouesses environnementales de nos chers voisins.

Car si la France se targue d’avoir imaginé l’écologie scientifique, l'Allemagne a inauguré avec ses Grünen l’écologie politique qui pèse beaucoup plus lourd dans les urnes et dans les gouvernements que celle de nos petits chamailleurs d’EELV.

Jusqu’à faire renoncer Angela Merkel à son industrie nucléaire quand une centrale japonaise construite au raz des flots se fait inonder - dramatique mais prévisible - par une grosse vague. Les centrales allemandes n’étaient à la merci ni d’un tremblement de terre ni d’un tsunami mais de la trouille d’un peuple.

Qu’elle soit fondée ou pas n’est pas le sujet.

Le sujet est que ce putatif péril a été, au nom de l’environnement, remplacé par une nuisance certaine, celle des centrales à charbon, le pire des combustibles fossiles. Alors que l’Europe s’inquiétait des poumons de ses citoyens et du réchauffement de la planète, l’écologiste allemand aura réussi cette performance : remettre dans le ciel du XXIe siècle les fumées du XIXe siècle. Et faire la leçon à une France qui émet deux fois et demie moins de gaz à effet de serre qu’elle.

Heureusement, à la même époque, il eut une idée géniale qui traversa le Rhin et conquit Paris : bannir les vieilles voitures des villes.

 

Le miracle de l’hydrogène sera-t-il un cauchemar ?

 

En vrai, l’hydrogène, ce n’est pas appétissant

 Je pourrais aussi ironiser sur la religion de la grosse voiture lourde et puissante, le culte de la vitesse libre, le trucage délibéré des systèmes de dépollution ou l’invention du contrôle technique - meilleur moyen de faire tourner les usines quand le client en a marre d’acheter.

Et maintenant le moteur à hydrogène dont l'Allemagne veut (et donc, va) nous faire prendre le train.

Attention, j’ai un peu enjolivé la promesse au deuxième paragraphe. En vrai, c’est moins appétissant.

D’abord, l’hydrogène ce n’est pas une énergie, mais un vecteur d’énergie, un moyen de stocker l’autre grand vecteur d’énergie qu’est l’électricité.

Sachant qu’il faut deux kilowatts d’électricité pour produire l’équivalent hydrogène d’un seul qui à la sortie de la pile à combustible, n’en restitue qu’un demi, l’efficacité n’est pas folichonne. C’est qu’il faut non seulement électrolyser, mais aussi comprimer très fortement et enfermer pour le transporter ce gaz volatil dont la molécule à deux minuscules atomes ne demande qu’à rejoindre l’univers. Des fuites très ennuyeuses car de l’hydrogène qui s’égare, c’est de l’eau terrestre perdue à jamais, pas simplement gaspillée au robinet.  

On débattra ailleurs de la comparaison avec le rendement global d’un moteur électrique à batterie, une chose est sûre, les quantités d’électricité nécessaires pour produire assez d’hydrogène pour remplacer les combustibles fossiles sont vertigineuses.  

Car dans la vision allemande, il ne s’agit pas d’alimenter quelques flottes d’autobus et parcs de camionnettes ou de dépolluer un peu l’industrie avec de l’hydrogène issu de l’électricité non consommée des parcs éoliens et solaires. Ça, c’est du bricolage à la française ; le plan de l’Allemagne ne vise rien moins qu’à remplacer à la fois le charbon de sa sidérurgie, l’hydrogène gris de sa chimie, le pétrole de son transport routier, une partie de son gaz de chauffage et ce qu’il lui reste de nucléaire.  

3 000 000 de camions à hydrogène = 427 réacteurs nucléaires

Donnons un ordre de grandeur avec le projet européen qui consiste à faire rouler sur le continent, d’ici 2030, cent mille camions à pile à combustible alimentée par hydrogène. Le transport routier est prioritaire car se prêtant très mal à l’alimentation par batteries, chaque camion devant en embarquer des tonnes qui coûteraient une fortune et prendraient la place du fret.

Selon des chercheurs de l’Atelier d’écologie politique mandatés par le site Reporterre, ce simple projet nécessitera, pour alimenter leurs piles à combustible, d’y consacrer 910 km2 de panneaux solaires – huit fois la surface de Paris ou 15 réacteurs nucléaires.

Et cela pour 100 000 camions…

Il y en a trois millions en Europe. Tous les équiper d’une pile à combustible  – oublions l’industrie, nos voitures et tout le reste - supposerait de recouvrir l’équivalent de la Bretagne de panneaux. Ou de leur consacrer 427 réacteurs nucléaires, soit huit fois ceux dont la France dispose encore.

Et cela pour le seul remplacement du gazole du seul transport routier de marchandise…

 

Planter des éoliennes dans des champs de panneaux solaires entre deux centrales nucléaires…

Admettons que nos chercheurs écolos aient un peu voire beaucoup grossi le trait et que la surface du Limousin ou 300 centrales y suffiraient, il reste néanmoins évident que l’hydrogène nécessaire au remplacement du pétrole, du gaz et du charbon, même à l’échelle de la seule Allemagne, ne sera pas au rendez-vous, quand bien même on planterait des éoliennes en rangs serrés dans des champs de panneaux solaires entre deux centrales nucléaires et jusqu’aux fins fonds de la Poméranie antérieure. A moins que… A moins que… - à ce stade je ne sais s’il s’agit de colossale dinguerie ou d’une illustration de l’audace et du formidable dynamisme allemand – à moins disais-je que cet hydrogène ne soit produit dans des pays disposant à la fois d’immenses surfaces inexploitées et d’un fort ensoleillement.

Comme l’Amérique du Sud, et surtout l’Afrique, continent où la diplomatie et l’industrie allemandes s’activent ces temps-ci à nouer des partenariats et à acheter des concessions en vue d’implanter champs solaires géants et méga-centrales hydroélectriques.

Le projet consiste à importer ensuite de ces pays, par pipeline jusqu’à la Ruhr et par tankers jusqu’à Hambourg, l’hydrogène produit sur place.

Si vous ne trouvez pas cela prodigieux (ou démentiel), je souligne juste qu’il n’y a pas si longtemps – dix ans – il était impossible de conserver plus d’une semaine vingt kilos d’hydrogène dans le plus sophistiqué et hermétique des réservoirs avant qu’il ne s’enfuie.

Là, on envisage sans frémir de le transporter en bateau et dans des tuyaux. Mais sans doute  « impossible » n’est-il pas allemand.

Ah, j’oubliais : tout ceci se ferait (je n’ose pas employer le futur, ça me fiche la trouille) dans le plus grand respect de l’environnement, de la faune et de la flore, sans sacrifier de terres agricoles ni de ressources en eau vitales pour les populations locales, natürlich !

 

Le miracle de l’hydrogène sera-t-il un cauchemar ?

 

Et donc, disions-nous au tout début de l’article, nos rigolos d’écolos franchouillards qui nous demandent de manger un peu moins de viande, de jeter moins de plastique, de davantage prendre le train et moins l’avion, de rouler plus à vélo et moins en auto, seraient de grands utopistes, de doux dingues, de grands malades, de futurs dictateurs ?

Moi, finalement, je  les trouve assez raisonnables.

 

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