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Pourquoi achetons-nous moins de voitures ?

Dans Economie / Politique / Marché

Jean Savary

Le marché automobile est en crise. Certes il y a la crise, l’envolée des tarifs et peut-être aussi un manque d’appétit pour l’innovation. Mais il faut aussi se poser la question du besoin. La voiture nous est-elle toujours aussi indispensable ?

Pourquoi achetons-nous moins de voitures ?

Même s’il s’est un peu redressé cet automne, le marché automobile français reste loin des plus de deux millions d’immatriculations d’avant le Covid, parti pour s’établir autour d’1,7 million en cette fin d’année. Il manque toujours plus de 20 % des bons de commande et plutôt un bon tiers du côté des clients particuliers qui ne représentent plus que 42 % des achats contre une bonne moitié en 2019. Pire, ceux-ci n’achètent plus français qu’à 37 % contre 48 % en 2020 !

À l’échelle européenne, ça ne va pas mieux : on est passé de 15 à 10 millions de voitures neuves par an.

Pour trouver un remède à cette déprime commerciale qui, pour l’industrie automobile du Vieux Continent représente une menace plus immédiate que la concurrence chinoise, il faut d’abord lui trouver des causes, des explications.

Certes, il y a l’économie. L’inflation a beau s’être tassée, la hausse des prix n’a pas enclenché la marche arrière et n’a pas été entièrement compensée par les hausses de salaire.

Si l’on ajoute à cela, pour une France qui craint l’avenir plus qu’elle n’anticipe le futur, un taux d’épargne qui est passé de 15 à quasiment 20 % en quelques années, le motif « on n’a plus de sous à mettre là-dedans » s’impose avec une certaine évidence.

Il y a aussi le manque d’appétit pour la nouveauté que j’avais déjà évoqué et bien sûr, la folle envolée des tarifs post-covid, même si celle-ci avait démarré bien avant, au milieu des années 2010, sans le moindre effet sur le niveau du marché.

Mais il y a, je pense encore une autre raison à cette mévente : nous n’avons peut-être plus besoin de deux millions de voitures neuves chaque année pour combler nos besoins de mobilité.

Cette explication s’est imposée à moi le week-end dernier à l’occasion du rassemblement annuel d’une bande de copains, où j’ai pu constater que trois d’entre nous, soit la moitié du groupe, n’étaient plus candidats au bon de commande, non par désintérêt pour l’automobile ni par manque de moyens, mais tout simplement parce que la société a changé.

Trois coups de pédale

D’abord, il y a Patrick qu’il a fallu aller chercher à la gare : il n’a plus de voiture depuis cet été, sa 308 a déclaré forfait à plus de 300 000 km et il ne compte pas la remplacer. Par conviction écologique dit-il.

Un bon rouleur le garçon, minimum 25 000 km par an. Comment va-t-il faire ? En fait, sa Peugeot, il ne s’en servait déjà plus au quotidien, allant au boulot à vélo. Dans sa grande ville de l’Ouest comme dans bien d’autres, les pistes cyclables sont désormais partout. Pour les courses, comme beaucoup de Français, il ne va plus remplir un caddie à l’hypermarché mais, plus souvent, ses sacoches au supermarché d’à côté, à trois coups de pédales ou cinq minutes à pied.

Pourquoi achetons-nous moins de voitures ?

Et pour ses nombreux déplacements de week-end et de vacances ? Il y a désormais le TGV dans sa ville et sur son téléphone quelques applis de covoiturage et de location, dont une entre particuliers et une autre municipale, toutes deux « à des prix imbattables ».

En fait, commente-t-il, posséder une voiture ne lui est plus indispensable et s’il ne remplace pas sa 308, ce n’est pas par souci d’économie – lui et sa compagne gagnent correctement leur vie – mais pour moins polluer et se simplifier la vie.

Mais derrière ses explications, la véritable raison pour laquelle Patrick ne repassera pas chez le concessionnaire est que la société – et sa municipalité – propose désormais de nombreuses alternatives à la possession d’une auto.

Une auto en béton

Joël, francilien prédit que Patrick va beaucoup se compliquer la vie. Lui, sa vieille voiture il ne s’en passerait pas, même si, comme Patrick, il ne s’en sert jamais au quotidien. Interdite de circulation dans sa proche banlieue, elle ne roule que pour partir en week-end et en vacances en famille et s’il conduit 6 000 ou 7 000 km par an, c’est le maximum. Et aussi le minimum car pour se rendre dans sa résidence secondaire en pleine pampa angevine, le train n’est pas une option. Son monospace diesel japonais acheté neuf il y a un peu plus de 20 ans affiche donc 150 000 km, un contrôle technique vierge, quelques éraflures et hormis trois ou quatre batteries, une vanne EGR et des révisions, ne lui a coûté rien d’autre que du gazole.

Pourtant, cela fait bien cinq ans qu’il songe à le remplacer. Au début, dans la perspective de sa proche interdiction en première couronne de Paris, ensuite parce qu’il culpabilise de rouler avec un vieux diesel sans filtre et enfin parce qu’il a peur de la panne et sans doute aussi parce qu’il en a un peu marre de cette affreuse pantoufle grise et a les moyens de la remplacer. Il la donnerait bien à sa fille, mais celle-ci ne veut pas passer le permis.

Cinq ans donc qu’il me questionne sur quoi acheter, mais ça ne va jamais : trop petit dedans, ou bien trop grand dehors pour sa place de parking taillée à l’époque des R5. Ou alors trop cher ou trop voyant. À court d’inspiration, je finis toujours par lui recommander de garder sa Toyota Corolla Verso (première génération, c’est vous dire si elle est moche), et qu’à condition de bien l’entretenir, elle lui fera encore des dizaines de milliers de kilomètres.

Le problème de Joël, c’est que « des bagnoles comme la mienne, on n’en fait plus ». De fait, quand la mode est passée des monospaces petits dehors-grands dedans aux SUV grands dehors-petits dedans, on ne lui a pas demandé son avis.

Mais la vraie raison de sa fidélité à son monovolume, c’est sa fiabilité en béton et que n’étant pas du genre à « gâcher », il ne l’abandonnera qu’avec une bielle à travers du carter, ce qui ne semble pas près d’advenir.

Ce non-acheteur qui participe au vieillissement du parc automobile français (et européen) est un bénéficiaire de l’allongement spectaculaire de l’espérance de vie de nos voitures qui, malgré quelques désastreux et scandaleux ratés, dément les déplorations sur leur obsolescence programmée.

Pourquoi achetons-nous moins de voitures ?

Un kilométrage divisé par quatre

Lors de ce week-end entre copains, il y avait aussi Yohann. Lui, il aimait bien changer de voiture souvent, toujours avant 100 000 km et toujours pour du neuf. Habitant à 60 kilomètres de la métropole où il travaille comme ingénieur en informatique, il roulait beaucoup, essentiellement en mode auto-boulot-dodo.

Mais ça, c’était avant le Covid et le télétravail. De cinq allers-retours hebdomadaires de 120 km, il est passé à un ou deux trajets. Grâce à un kilométrage divisé par quatre, il a le même BMW X1 qu’en 2018 et envisage de le garder encore longtemps car il a une autre priorité : sa maison. Travaillant désormais majoritairement à domicile, il s’est aménagé un vrai bureau, a revu l’isolation et le chauffage de sa maison et, afin de profiter des deux heures de trajet gagnées, va se faire creuser une piscine.

On ne peut pas se féliciter que de plus en plus de nos concitoyens « privilégient la marche et le vélo » (et le train), qu’ils conservent toujours plus longtemps des voitures de plus en plus « durables », que grâce au télétravail, il y ait moins de monde dans les bouchons au bénéfice des émissions de CO2 et en même temps se plaindre que l’on vende moins de voitures.

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