Pourquoi le Rassemblement national souhaite-t-il sacraliser le patrimoine automobile ?
Avec sa proposition de résolution à l'Assemblée, le parti d'extrême droite entend défendre l'automobile française et son histoire. Mais quel but recherche réellement le groupe parlementaire dirigé par Marine le Pen ?

L’affaire est passée sous les radars des commentateurs politiques. Pourtant, la semaine dernière, le groupe RN a déposé à l’Assemblée nationale une proposition de résolution pour la reconnaissance officielle du patrimoine automobile français, et, dans la foulée, tient à mettre en place des mesures concrètes pour sa sauvegarde. Bigre.
Les parlementaires du parti d’extrême droite demandent que l’inscription aux monuments historiques des autos anciennes soit élargie, que les évènements les valorisant soient aidés et que la filière industrielle et artisanale soit mieux subventionnée. Enfin, le RN souhaite la création de pôles spécialisés pour développer la formation autour des véhicules anciens. Du lourd, en somme.
Une dépense financière supplémentaire
Sauf qu’une inscription aux monuments historiques offre quelques avantages non négligeables aux propriétaires des voitures si, d’aventure, le classement est élargi. Des dispositifs de subventions pour leur restauration, des déductions fiscales diverses et la suppression de droits de succession sont prévus par la loi. 478 voitures sont aujourd’hui classées, dont de nombreux joyaux du musée national de Mulhouse, comme la fameuse Bugatti Royale coupé Napoléon.
Si ce classement s’élargit aux Citroën DS, par exemple, qui n’ont pas démérité par leurs innovations technologies et designistiques. On imagine la facture des subventions à leur accorder, puisqu’il en reste, selon les estimations, plus de 70 000 en circulation. De la même manière, on imagine le grand sourire des organisateurs de Rétromobile, entre autres, recevant des aides financières, puisqu’un autre souhait du RN consiste à aider les évènements dédiés aux anciennes.

Dans la foulée, comme le parti n’est pas à une dépense près, il souhaite aussi aider la filière artisanale spécialisée dans ce domaine, et la formation des jeunes à ces métiers. C’est beau comme une campagne de rasage gratis, surtout en cette période de disette financière de l’État, et à l’heure du débat autour d’un budget tout en serrage de ceinture.
Une résolution sans la moindre contrainte
Le RN est-il totalement inconscient en matière financière ? Absolument pas, le parti est même ultra-prudent. Car sa proposition n’est qu’une résolution, et surtout pas une loi qui obligerait l'État à régler les douloureuses des subventions.
C'sst qu'une résolution, lorsqu’elle est adoptée, ne comporte aucune contrainte rèlementaire ni pour l'exécutif, ni pour une collectivité, ni pour personne d'aileurs. Il s’agit, à l’image d’un rapport gouvernemental, de faire circuler une idée auprès du législateur et du public. Et comme un rapport, elle peut parfaitement terminer sa course dans la corbeille à papier.
Mais dans ce cas, pourquoi le RN a-t-il pris la peine de se lancer dans cette campagne inutile ? Le parti souhaite simplement adresser un message à ses sympathisants et à tous ceux qu’il espère rallier à sa cause.
La nostalgie, camarade
Un message, en forme de « je vous ai compris ». Car le parti profite depuis des lustres d'une tendance en vogue, celle du rejet de toute forme nouvelle de contrainte et sur la nostalgie du temps d’avant, du temps ou tout allait mieux, ou l'on était libre de circuler, alors qu'aujourd'hui on ne peut plus rouler et que, par ailleurs, on ne peut plus rien dire.
D’où le rejet de toute nouveauté sociétale, environnementale mais aussi automobile. L’échéance de 2035 ? Le Rassemblement national n'en veut pas, itou pour les ZFE et les normes Cafe. Avec le slogan « c’était mieux avant » en porte-étendard à peine voilé, le parti de Jordan Bardella surfe sur la vague et entretient un sentiment qui ne demande qu’à se propager encore plus auprès d’un public forcément enclin, ecce homo, à se réfugier dans le déni et un passé d’avant la crise climatique, budgétaire, et sociale.
Une nostalgie dont l’automobile des trente glorieuses, entre autres, est l’un des emblèmes et qui est devenu l’un des fers de lance de l’extrême droite. Une extrême droite qui ne se soucie surtout pas de l’automobile du futur, et ne propose pas d’autre solution qu’un retour vers le passé.
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