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La plus importante recrue de Renault ne vient pas du secteur automobile, c'est un geek

Dans Equipement / Autres actu équipement

Michel Holtz

Avec l'arrivée au sein de ses équipes du pape de l'intelligence artificielle Luc Julia, le Losange entend bien envoyer un signal à ses concurrents et aux Gafa, de plus en plus impliqués dans la technologie automobile. Au travers ce recrutement, Luca De Meo, le patron de Renault, tient à démontrer que ses marques sont de retour dans la course à l'autonomie et aux voitures connectées.

L'intelligence artificielle, nouvelle priorité du groupe Renault ?
L'intelligence artificielle, nouvelle priorité du groupe Renault ?

Les observateurs du monde automobile n'ont d'yeux que pour eux : les cadres recrutés par Luca De Meo, le nouveau patron du groupe Renault. Du designer Gilles Vidal, ex-Stellantis, à l'ingénieur Gilles Le Borgne, lui aussi débauché chez Peugeot Citroën en passant par un autre designer, Alejandro Mesonero-Romanos (déjà reparti chez Alfa Romeo) et le communicant Christian Stein, tous deux en provenance de chez Seat, chaque transfuge a été étudié de pied en cap et son CV décrypté à la loupe. Dans ce mercato qui s'est déroulé au cours des premiers mois du règne du nouveau P.-D.G., un homme est pourtant passé sous les radars des professionnels de la profession pour une simple raison : il ne vient pas du sérail.

Avec Luc Julia, les chemises à fleurs vont trancher avec les costumes sombres des membres du comité de direction de Renault.
Avec Luc Julia, les chemises à fleurs vont trancher avec les costumes sombres des membres du comité de direction de Renault.

Et pourtant, le nouvel embauché n'est pas des moindres, puisqu'il s'agit du franco-américain Luc Julia. Il vient de prendre ses fonctions de directeur scientifique et responsable de la R&D pour la partie software. En gros, toute l'informatique embarquée et tous les développements technologiques futurs (hors mécanique) sont de son ressort. Un poste hautement stratégique et Julia a son rond de serviette à la table du comité de direction du groupe. Un poste hautement transversal aussi, puisqu'il touche à l'ensemble des marques (Renault, Dacia, Alpine, Samsung et Lada), pour l'homme aux chemises hawaïennes, qui va quelque peu contraster avec les costumes bien taillés de la direction de Renault.

Le co-inventeur de Siri

Malgré l'étendue du poste, et son importance, la nomination de Luc Julia n'a pas suscité des tonnes d'articles dans les médias automobiles. Car l'homme est inconnu dans le milieu, alors que c'est une véritable star de la tech. Il est même l'un des papes mondiaux de l'intelligence artificielle. À son actif : l'invention des objets connectés, dès la fin des années 90 lorsque le vulgum pecus découvrait à peine l'Internet. Surtout, c'est le co-inventeur (avec l'américain Adam Cheyer) de Siri, le fameux assistant vocal disponible sur les I-Phone.

La voiture connectée : l'un des futurs chantiers du nouveau directeur scientifique.
La voiture connectée : l'un des futurs chantiers du nouveau directeur scientifique.

Mais l'inventeur n'a pas qu'une tête bien faite, c'est aussi une forte tête qui travaille pour qui bon lui semble et à l'endroit qui lui convient. Il a envoyé paître le CNRS quelques semaines après son intégration, jugeant l'organisme "trop administratif". Quelques années plus tard, il a refusé l'offre d'Apple, qui lui a proposé de le rejoindre après le rachat de Siri. La raison ? Luc Julia n'a jamais porté la pomme dans son cœur. Dans son livre L'intelligence artificielle n'existe pas, il en parle en termes moyennement flatteurs. Pour lui, "Apple est connu pour avoir une certaine arrogance avec les utilisateurs de ses produits et son fondateur Steve Jobs était l'incarnation de cet état d'esprit".  Il s'est alors tourné vers son concurrent Samsung (le spécialiste de l'électronique, pas des voitures) qui l'a bien évidemment accueilli à bras ouverts en le bombardant vice-président responsable de l'innovation.

Le roi du bras de fer

Le nouveau venu travaille alors en Californie dans la Silicon Valley avec une équipe d'ingénieurs Samsung dédiés. Mais en 2017 celui qui a, en plus de sa nationalité française, un passeport américain, a le mal de son autre pays. Il exige de son employeur coréen un transfert du département de R&D à Paris, pas moins. Ce que le leader de la téléphonie mondiale refuse. Julia pose sa démission et s'en va.

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Mais Samsung se ravise quelques semaines plus tard et le rappelle. Travailler à Paris ? Pas de problème : le coréen rachète l'ancien siège du Crédit Lyonnais dans le 2e arrondissement et ses équipes de recherche  vont s'y installer quelques mois plus tard sous la houlette de l'intraitable Julia.

La voiture autonome : l'autre mission de Luc Julia.
La voiture autonome : l'autre mission de Luc Julia.

Mais à la fin de l'année dernière, Samsung se ravise. Les temps se durcissent et la nouvelle politique est draconienne : tous les départements disséminés à travers le monde doivent se rapatrier à Séoul. Julia met une fois encore sa démission dans la balance. Mais cette fois, le groupe coréen ne cède pas. Le Franco-Américain électron libre non plus : il ne déménagera pas en Corée.

C'est à cette période que Renault apprend que la star est disponible. et Luca De Meo lui-même se charge de recruter Julia. Entre les deux hommes, "ça a cliqué tout de suite", expliquera l'expert de l'intelligence artificielle. Pour la première fois de sa longue carrière, il accepte d'entrer dans une entreprise hors du monde de la tech. Ses conditions sont, pour le moment, raisonnables : il veut bien passer une dizaine de jours par mois dans son bureau au siège de Renault et le reste du temps, il travaillera depuis la Silicon Valley, sa seconde patrie.

La nomination de Luc Julia est un message aux concurrents

Mais que va bien pouvoir développer le génie des nouvelles technologies au sein du groupe Renault ? Il ne va certainement pas se contenter d'améliorer la reconnaissance vocale à bord de la Mégane. En revanche, au moment où tous les grands constructeurs semblent stagner en matière de voitures autonomes et de véhicules connectés, sa nomination est un signal à la concurrence.

Elle leur signifie que, côté autonomie, Renault ne sera pas en fond de grille dans les années à venir."Les constructeurs mondiaux en sont pour le moment au niveau 2,5", admet Julia dans une interview à BFM. Ils n'envisagent pas pour l'instant de dépasser le niveau 3, trop obnubilés par les investissements à concéder en matière de bascule vers l'électrique. Sauf que le roi de l'IA est dans la place et qu'il passerait bien à la vitesse supérieure.

Google, Apple, Facebook et Amazon : les Gafa sont prévenus.
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Le recrutement de Julia est aussi un message envoyé par De Meo aux Gafa. Une manière d'expliquer à ces derniers que, s'ils se rêvent à l'égal des grands groupes automobiles, Renault entend bien rester dans la course en embauchant un expert, sinon issu de leurs rangs, du moins à leur hauteur.

Les projets de Luc Julia, et ses ambitions, sont énormes. Mais les investissements en matière d'autonomie et de véhicules connectés sont considérables. Et pour investir, il faut être en capacité de le faire. Or, la situation financière de Renault n'est pas exactement au beau fixe, puisque l'ex-Régie a perdu 8 milliards d'euros l'année dernière.

Il reste donc à souhaiter que ce recrutement ne soit pas un simple effet d'annonce, un placard doré seulement destiné à envoyer un message aux concurrents et aux Gafa. Mais si tel était le cas, on peut compter sur Luc Julia pour ne pas faire de vieux os à Boulogne-Billancourt. L'homme qui a tenu tête à Steve Jobs, à son successeur Tim Cook et à Lee Kun-Hee (le patron de Samsung) n'est pas du genre à servir de faire-valoir.

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