Pourquoi la vanlife est une spécialité française ?
Sur les quatre groupes leaders du camping-car en Europe, trois sont Français. Plusieurs raisons expliquent cette prédominance nationale, et l'une d'entre elles est éminemment politique.
Si la France de l’automobile ressemblait à celle du van et du camping-car, l’industrie s’en porterait mieux. Car l’hexagone compte parmi les leaders de la vanlife sur le continent. Une domination ou seul le groupe allemand Hymer, et ses marques Laïka, Burstner, Dethleffs et Eriba, entre autres, parvient à se faire une place.
Car les trois groupes français s’en tirent plus que bien. Ils ont profité à plein de l’augmentation continue des ventes depuis le Covid. Dans un marché ou l’on redoutait l’explosion des prix et la fuite logique des clients, les ventes ont progressé de 10% depuis le début de cette année.
Champagne et marge opérationnelle à 12,8%
Du coup, chez Trigano (Chausson, Challenger, Adria, etc) on sabre le champagne en affichant une progression du bénéfice net de 374,5 millions d'euros. Évidemment, les chiffres ne sont pas comparables avec ceux de Renault ou Stellantis, mais la progression du groupe ferait le bonheur de Sochaux et Billancourt, puisque son bénéfice est en hausse de 21,5% par rapport à l’an passé et surtout, la marge opérationnelle de Trigano atteint 12,8%. De quoi laisser Carlos Tavares et Luca de Meo rêveurs.
Les deux autres géants français du secteur ne sont pas en reste. Le groupe nantais Pilote, beaucoup moins riche que Trigano, est, lui aussi, fringant. Le propriétaire des marques Bavaria, Le Voyageur, Hanroad et autres et ses 500 millions de chiffre d’affaires investit 10 millions d’euros dans son centre de pièces détachées. Quant au troisième larron de ce club gagnant, le groupe Rapido (Campérêve, Fleurette, Stylevan, etc), il affiche un chiffre de 800 millions d’euros et lui aussi investit. En l’occurrence, il s’offre une menuiserie industrielle flambant neuve pour 14 millions d’euros.
Mais qu’est ce qui explique cette bonne santé de la maison roulante française, supérieure à l’allemande puisque même le fleuron germanique Westfalia appartient aujourd’hui au groupe Rapido ? Les trois groupes réalisent bien sûr plus de 50% de leurs ventes à l’export à travers toute l’Europe, mais ils bénéficient d’une assise solide en France. Et ils ont pu se développer ici pour deux raisons.
Morcelé en une multitude de PME venues de la caravane et rallié au camping-car, le secteur s’est regroupé dès les années 89 et 90. Et puis, la vanlife a prospéré chez nous pour une raison finalement assez politique. Le client idéal, et majoritaire, de Pilote, Rapido et Trigano, dispose d’un certain pouvoir d’achat, il a suffisamment de temps pour se balader et voir du pays, tout en affichant une bonne santé. Il s’agit là de la définition précise du jeune retraité.
Merci le régime de retraite français
Or, jusqu’il y a peu, la France était le pays d’Europe ou l’âge du départ à la retraite était l’un des moins élevé du vieux continent. Autant dire que cette situation a permis au marché français de se développer, grâce à ses retraités de 60 ou 62 ans, en pleine santé, et susceptibles de s’offrir un engin entre 60 000 et 100 000 euros.
Autant dire que l’exception française a fait le bonheur des marques de camping-cars français. Et nul doute que si les boss des trois groupes hexagonaux n’étaient pas dans la rue lors des récentes grèves contre la réforme des retraites, leur cœur, en leur fort intérieur, était du côté des manifestants.
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