Je ne suis pas là pour faire des photos, enregistrer le son émis par ce nouveau proto, faire une vidéo (pour tout cela, d’autres l’auront très bien fait) mais pour écrire sur ce que j’ai vu, lu, entendu, pour vous rendre quelques émotions du Mans. La nouvelle Pescarolo-Le Mans est garée devant son box. La magie du Mans opère déjà. Il ne s’agit pourtant que d’un proto destiné à une école, mais d’une école dans ce qu’elle sait faire de mieux : apprendre, transmettre une passion. L’arrière du proto paraît un peu « léger », inspiré par un proto tout droit descendu d’une course de côte. Peu importe. Tinseau, tout à l’heure, passionné s’il en est, m’a assuré tout à l’heure que l’auto est rapide. Je lui fais confiance, entièrement confiance. Mes confrères, journalistes, photographes, l’entourent systématiquement, dès qu’elle s’arrête, une fois chaque série de deux tours de baptême terminée. Le soleil brille, depuis ce matin il brille. Le silence est d’or, dès que le proto s’arrête ou s’éloigne. Mais là, d’un coup, le V8 refuse de redémarrer. Deux membres du staff technique se penchent sur le nouveau né. Après tout, il n’en est encore qu’à ses premiers tours de roue. Une petite tension point d’autant que le cœur de chaque futur baptisé pulse ; c’est que chacun attend son tour avec impatience sinon une pointe d’anxiété. Les photos se multiplient ; elles se multiplient d’autant que le proto est arrêté, anormalement attardé devant son box. La Pescarolo-Le Mans est reliée à un ordinateur, j’entends : « Christophe, redémarre. » Rien ne se passe. Christophe, lui, entre-ouvre sa visière. Repartira-t-il ? Mais bien sûr qu’il repartira ; une question de secondes. Il faudrait que je vous parle de tant d’autres choses, encore : des odeurs, des fumées et des odeurs. Sur le muret des stands ou sur la pitlane, les membres de l’école de pilotage sont nombreux, attentifs. Claude Galopin, se penche sur le proto, il discute, calmement ; il en a vu d’autres, connus d’autres des soucis, des moments de stress bien plus intenses. Le balai des tours reprend. Au prochain arrêt, Christophe explique à un confrère : « Cela passe à fond là haut. Là je lève un peu le pied mais… » Sans doute parle-t-il de la courbe Dunlop. Tout est vide alentour. Quelques badauds se sont pourtant glissé dans les tribunes pour nous faire réaliser que l’esprit des 24 Heures veille. C’est un jour ordinaire sur le Bugatti. Il est maintenant 14h30 et le ciel commence à se couvrir. Peut-être les nuages vont-ils finir par définitivement voiler le soleil. Dire que je viens tout juste de m’apercevoir de la présence d’Henri Pescarolo, là, à côté de moi.