Pour une fois, l’itinéraire d’essai convenait assez bien à la monture malgré l'absence de revêtement franchement dégradé dans ce riche pays souabe, et ne souffrait pas d’un trafic trop dense, chose rare en Allemagne. Manque de bol, sur notre journée d’essai, les 9/10e de notre parcours se sont déroulés sur chaussée humide à détrempée, et qui plus est, sur des exemplaires sans différentiel autobloquant.

Essai vidéo - Mercedes E63 AMG : le loup et l’agneau

Bien difficile dans ces conditions de tirer tous les enseignements sur le comportement de l’auto. Cela dit, elle nous a semblé bien équilibrée, plus facile d’emploi et sensiblement plus efficace qu’une C 63 ou que la CLK 63, à défaut d'avoir testé l’ancienne E 63.

Le plus réjouissant, c’est la possibilité d’adaption au style de conduite des paramètres de gestion de la boîte (4), de la toujours prévenante suspension (sans jamais être sujet au pompage) dotée d'un Ride Control AMG à 3 positions (pneumatique sur le train arrière) avec une adaption en continu du niveau de tarage des amortisseurs, et de l’ESP sur 3 modes. Le tout par l'intermédiaire des trois boutons appropriés en bas de la console, ou simplement par celui siglé AMG pour une séance musclée. C'est en définitive d’un usage bien moins compliqué et au moins aussi efficient que pour la BMW M5 et ses 297 possibilités de réglage!

Essai vidéo - Mercedes E63 AMG : le loup et l’agneau

Il en ressort un étonnant compromis entre grande autoroutière confortable à la tenue de cap imperturbable et propulsion sportive hors-pair procurant un réel plaisir de conduite. Il est supérieur à celui distillé par une Audi RS6 à notre avis, même sur revêtement assez peu adhérent (ce qui ne remet pas en cause la plus grande efficacité de la RS6 dans ces conditions). Sans doute en raison de la répartition à 60 % seulement du couple sur l'arrière pour l'Audi, qui est par ailleurs est plus pénalisée par sa masse trop importante. Cela dit, l'inertie de l'AMG se fait déjà sentir, on n'est pas au volant d'un coupé affichant une demi tonne de moins sur la balance. Si la E 63 fait preuve d’une agilité déjà agréable le contrôle de stabilité en mode interméiaire Sport, il faut déplorer qu’il reprenne automatiquement du service au freinage en mode ESP off. Impossible donc de l'inscrire sur les freins en entrée de virage serré, un comble pour une sportive de cette trempe, tout comme de retrouver le différentiel autobloquant mécanique avec effet de blocage de 40 % en option (3 000 €).

Dommage car après ce galop de quelques centaines de kilomètres, le freinage nous a semblé impeccable (même sans les freins céramique/ carbone apparement non disponible sur le marché français), prenant un avantage net sur la M5 en résistance à l'échauffement, et la direction presque parfaite, plus directe de 22 % que sur la Classe E conventionnelle presque parfaite avec un rapport de démultiplication de 14:1.

Essai vidéo - Mercedes E63 AMG : le loup et l’agneau

Une fois n’est pas coutume, la E63 ne joue pas l’inflation en taille de roues, bien au contraire. Elle se contente en série de 18 pouces, tandis que la concurrence se monte du col avec du 19 ou 20 pouces. Nous avons conduit l’AMG avec la monte de série et surtout avec l’optionnelle en 19 pouces. Sous la pluie, nous n’avons pas noté grande différence. Sur sol sec, certains jugeront sans doute que l’option aurait du être du 20 pouces, mais nous à priori, on apprécie plutôt ce refus de l’escalade. De toute façon, motricité, efficacité et facilité du comportement, en particulier la stabilité en grandes courbes ou les réactions en phase transitoire seront à vérifier lors d’un futur essai de la E 63 sur le sec. Et avec autobloquant...

Tarif élitiste

La E 55 AMG commercialisée début 2003 (qui disposait d’un V8 5.4 litres à compresseur de 476 ch) coûtait moins de 100 000 €. Celle, toujours de précédente génération, lancée au printemps 2006 qui adoptait le nouveau 6.2 litres (à 514 ch) et l’appellation E63 grimpait déjà aux alentours de 110 000 €. Aujourd’hui, la nouvelle E 63 s’affiche sans vergogne à 124 000 €. L’exclusivité de cette Classe E très musclée se paye donc très cher. Certes, la très bonne qualité des matériaux et de la fabrication, la sécurité passive sans faille (supérieure à l’ancien modèle) ou les progrès des prestations dynamiques peuvent justifier partiellement cette inflation, mais pas totalement. L’écart de prix face à la Classe E 500 Avantgarde Executive facturée 75 100 €, malgré l’équipement de série un peu plus étoffé, paraît également difficilement justifiable. Face à une Cadillac CTS-V -au moteur de Corvette ZR-1 à peine dégonflé- plus performante, la E63 semble horriblement chère, avec 50 000 € de différence à équipement comparable. Même avec la Jaguar XFR au V8 Supercharged (par compresseur Roots) qui est la plus comparable en particulier pour son homogénéité ou pour le couple de 625 Nm disponible dès 2500 tr/min), l’écart dépasse 30 000 euros. Il n’y a que la limousine Maserati dans sa version la plus puissante pour faire payer encore plus cher, malgré des prestations bien plus inégales.

A cela, il faut ajouter un coût d’usage élevé, dont celui de l’entretien ou du super-malus annualisé, et quelques options obligatoires ou du moins recommandables. Le différentiel AR à glissement limité déjà mentionné est disponible seul ou dans le « Pack Performance AMG » facturé la bagatelle de 8 500 € qui comprend également les jantes en alliage forgées de 19 pouces (255/35 à l’avant et 285/30 à l’arrière, 2 350 € en option séparée), du déflecteur de coffre, du volant AMG à 3 branches, et surtout du Performance Ride Control AMG. Mis à part quelques autres options spécifiques à cette version comme les inserts intérieurs en carbone (3 500 €), on retrouve une quinzaine d’accessoires communs aux autres Classe E comme le Distronic Plus (2 600 €) ou l’alarme périmétrique et volumétrique (600 €). Bref, de quoi signer un chèque de plus de 140 000 € si on ne regarde pas trop à la dépense.