En tout cas, les explications de Moritaka Yoshida, l'ingénieur de Toyota, ont le mérite de l'humanisme : "Nous pensons que le conducteur doit rester au centre, qu'il doit prendre des initiatives. (…), il faut que l'homme soit l'élément central." Il est mignon. Faut voir, ça dépend. J'en connais qui… et moi-même, parfois… Mais passons. Ça dépend aussi et surtout de l'auto. Je m'explique…

Infiniti vient de rappeler 23 exemplaires de sa berline Q50 qui a un léger souci : la direction peut ne plus répondre. "Répondre" !?! Allô, les roues ?? Cette nippone a une particularité : le volant agit sur celles-ci via son réseau informatique qui pilote des moteurs électriques commandant le braquage. Certes, il y a encore une colonne de direction – dans son obscurantisme, la réglementation exige que subsiste une liaison mécanique – mais uniquement en secours, en plus de trois modules électroniques, de secours eux aussi. Hélas, il est arrivé que les trois machins se mettent en rideau et que la direction mécanique ne reprenne pas la main. Ne me demandez pas pourquoi : la faute à  "certaines températures extrêmes". Cela me rappelle cet ingénieur qui m'avait vanté les mérites du système "by wire" (par fil). Pas de colonne de direction pénétrant dans l'habitacle en cas de choc, une architecture mécanique pouvant être repensée, pas de vibrations dans le volant, la possibilité de corriger les mauvaises manœuvres du pilote du dimanche, etc. "OK, tant que ça marche", avais-je très finement objecté. Et celui-ci de me demander si j'avais déjà vu un moteur électrique, un calculateur électronique ou un fil de téléphone dysfonctionner.

Ben oui. Et pas qu'un peu. Des moteurs d'essuie-glace, de lève-vitres et même celui de mon presse-purée. Les patates trop chaudes sans doute. Et aussi mon ordinateur, mon décodeur TV, mon lave-linge, mon pèse-personne, mon réveil matin… Sans oublier l'interminable conversation téléphonique de deux de mes amis bretons, entièrement enregistrée par mon répondeur téléphonique, à 500 km de chez eux. Un fil avait dû fourcher, mais pas leur langue : coup de bol, ils ne disaient pas de mal de moi.

Tout ça pour vous expliquer pourquoi je veux une voiture autonome. Puisque la réglementation finira par craquer sous la pression des constructeurs, nous aurons bientôt des voitures dont les pédales de freins et le volant ne commanderont plus que des microprocesseurs, comme c'est déjà souvent le cas de l'accélérateur, du frein à main et autres gadgets dont la fiabilité n'est pas légendaire. Ce jour-là, je ne veux pas me voir basculer dans le ravin ni regarder la calandre du 40 tonnes se rapprocher. Je veux dormir, mourir dans mon lit en quelque sorte. Donc, une voiture autonome et un oreiller, et que ça saute !

 


Voiture autonome : Toyota dit non, je dis oui...


Jean Savary, nouveau collaborateur de Caradisiac, a été pendant plus de dix ans rédacteur en chef du magazine Auto Moto. Dorénavant, c’est pour vous qu’il décrypte l’actualité avec pertinence, voire… impertinence.