Plutôt jolie, racée même, propulsée par un noble moteur V6, la Dino avait tout pour devenir la star de la nouvelle Formule 2-1600. Bien née et performante, elle grandit souvent bien seule et comme pour se venger de cet abandon, elle se révéla bien capricieuse.

Lancé dans un duel au sommet avec Ford, Ferrari a plus que jamais besoin de restaurer ses finances. Frémissant rien qu'à la rumeur d'un accord entre Ferrari et un constructeur étranger, Fiat sous l'influence de Gianni Agnelli, décide de resserrer ses liens avec son prestigieux compatriote. Le premier fruit de cette liaison apparaît au salon de Turin en novembre 1966 sous la forme d'un coupé Fiat animé par un moteur V6 Dino. Conçu par l'ingénieur Rocchi, ce bloc deux litres peut fournir également une excellente base pour la nouvelle Formule 2-1600 cm3 entrant en vigueur en janvier 1967, d'autant que la production industrielle des Dino-Fiat permet l'homologation.

Largement soutenu par Fiat qui voit là une belle opération de promotion pour ses produits, le projet est rondement mené. Le prototype de la Dino F2-166 (16 pour 1600 et 6 pour six cylindres) apparaît au Racing Car Show de Turin en février 1967. Conservant un air de famille prononcé avec les monoplaces 1500-F1 nées en 1964, la Dino est doté d'un châssis semi-monocoque renforcé par un bâti tubulaire pour soutenir le moteur. Celui-ci est donc un V6 à 65° réalésé à 1596,3 cm3 à 18 soupapes alimenté par injection et développant 200 ch. Présent sur tous les fronts (F1, Prototypes, montagne), Ferrari ne peut accorder que peu d'attention au développement de la F2 et la Dino n'effectuera qu'une seule sortie en juillet.

Guère performante tant au niveau du comportement que sur le plan de la puissance pure, la Dino se voit condamnée à de longues séances d'essais à Modène où elle teste notamment de nombreuses évolutions du V6, dont un 24 soupapes de 220 ch nettement plus prometteur. Après un intermède en Formule Tasman, plutôt encourageant, la Dino retrouve le championnat d'Europe F2. En dépit du talent de Ickx et Amon, la petite Ferrari se révèle totalement surclassée par les Matra et les Brabham à moteurs Ford Cosworth. Soulagé par l'abandon du programme prototypes, la Scuderia trouve enfin le temps de s'occuper de la Dino au début de l'été. Le V6 gagne une dizaine de chevaux et un gros travail aérodynamique (aileron central à commande hydraulique, spoilers avant) finit par la rendre compétitive d'autant plus que ses pneus Firestone se révèlent très performants. Brambilla ouvre le palmarès à Hockenheim, récidive à Rome tandis que De Adamich s'adjuge trois des quatre manches de la Temporada. Ce brusque regain de performances fera naître d'ailleurs la suspicion. Certaines rumeurs feront état du montage de moteurs deux litres dans les monoplaces expédiées en Argentine où elles auraient été assurées de l'impunité faute de commissaires internationaux sur place.

Il semble cependant que Ferrari aurait pris un bien gros risque pour sa réputation en trichant dans des épreuves finalement mineures et il serait plus judicieux de penser que cette supériorité était due aux pneus Firestone, très supérieurs sur les revêtements abrasifs et poussiéreux des autodromes argentins. En tout état de cause, cet hiver 68/69 marquera le point d'orgue de la carrière de la Dino, car pratiquement dans le même temps, Amon s'imposera avec la version 2.4 litres au championnat de Tasmanie. La saison européenne 1969 où trois voitures seront alignées pour Bell, Brambilla et Regazzoni sera, en effet, totalement catastrophique. Ferrari qui a repris son programme Prototype et connaît de sérieuses difficultés en F1, abandonnent pratiquement les Dino à leur sort et après une demie saison calamiteuse décide de se retirer de la discipline. On verra encore une Dino F2 engagée à titre privé par Brambilla en 1970, mais faute de moteur de rechange et du moindre soutien de Ferrari, il finira par s'acheter une bonne "vieille" Brabham Ford.

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