En direct de la loi : les amendes radars sont-elles plus chères pour les patrons ?

En direct de la loi : les amendes radars sont-elles plus chères pour les patrons ?

 

La question de la semaine

« J'ai une société et trois véhicules au nom de cette société. Et je viens de recevoir une citation à comparaître après avoir entamé une procédure pour contester plusieurs PV, de stationnement et d'excès de vitesse par radars automatiques. Mon avocat m'affirme que pour chaque contravention, les amendes peuvent être multipliées par cinq par rapport au montant normalement encouru par de simples particuliers. C'est vrai ? »

Maurice (Vénissieux)

Combien coûte un avocat ?  Si vous souhaitez vous faire défendre par un avocat pour un excès de vitesse, comptez de 600 à 2000 euros selon la nature de la procédure et si elle a lieu à Paris ou en province. La réputation de l'avocat a également une influence sur les tarifs.

 

Oui, au tribunal, il est arrivé de demander

« des sommes astronomiques » aux patrons !

La réponse de Maître Tichit : « En fait, la difficulté, c'est que le parquet a voulu faire en sorte que cela soit possible. C'est à dire que pour vraiment punir les gérants de société, de leur manque de diligence pour savoir qui était le conducteur au moment des faits et qui était donc l'utilisateur des véhicules de fonction, l'idée [du parquet] était donc de citer à comparaître directement la personne morale [autrement dit la société elle-même, NDLR]. Car, dans les textes, il existe cette possibilité de faire payer à cette personne morale cinq fois le montant prévu pour les personnes physiques. Donc oui, c'est en effet une pratique qui a eu cours.

Pour récapituler : le parquet qui est à l'initiative des poursuites pénales et donc des citations à comparaître devant les tribunaux convoquait donc tout bonnement directement les sociétés, soit les personnes morales, et non leurs représentants légaux, c'est-à-dire les chefs d'entreprise et autres gérants de société. Est-ce bien cela ?

Tout à fait, c'était la société qui était directement citée à comparaître en lieu et place du gérant de ladite société. Or, la loi prévoit bien que c'est le gérant de la société qui doit être cité. Et lorsque cela est bien ce dernier, les montants maxima légaux sont les montants fixés par la loi classique. Tandis que si c'est la personne morale, ces maxima peuvent alors être multipliés par cinq...

On a donc vu des jugements qui ont été rendus avec des sommes astronomiques, car mises à la charge des personnes morales. Evidemment, il y a donc eu des recours qui ont eu lieu, jusqu'à la Cour de Cassation, notamment dans l'une des affaires que j'ai pu mener à bien. Le 19 décembre 2012, heureusement la Cour de Cassation est venue clarifier ce point, en admettant qu'il était absolument impossible que des personnes morales soient citées à comparaître directement devant les juridictions pour des amendes contraventionnelles, après contestation.

Vous êtes donc en train de nous dire qu'en procédant ainsi, le parquet a en fait agi de manière tout à fait illégale !

Oui, c'était une pratique qui était opérée plutôt à dessein de punir particulièrement les gérants de société de leur négligence. »

Des jugements pourtant tout à fait contraires au droit !

Conclusion de Caradisiac : De fait, les avis de contravention sont souvent envoyés à la société elle-même - personne morale - et non à son représentant légal. Il n'en fallait pas plus aux Officiers du ministère public (OMP), en charge des poursuites devant les juridictions, pour tenter par une pirouette de les faire condamner, au même titre qu'une personne morale, au quintuple de l'amende prévue pour les personnes physiques, en vertu de l'article 131-41 du code Pénal, comme nous l'a expliqué Caroline Tichit.

Or, selon les textes en vigueur (articles L121-2 et L121-3 du code de la Route), c’est bien ce dernier - personne physique et non sa société elle-même -, qui doit être théoriquement poursuivi en justice et, éventuellement, reconnu redevable pécuniaire – voire carrément coupable – pour les infractions décrites sur les PV reçus et contestés. A tous les gérants de société, quand vous recevez une citation à comparaître sur laquelle l’article 131-41 du code pénal est mentionné, la plus grande méfiance est donc recommandée ! Et pour défendre correctement votre cause, n’hésitez pas à vous munir de la jurisprudence de Me Tichit, ainsi que de celle-ci, qui rappelle également que les représentants légaux des entreprises ne peuvent en aucun cas être condamnés au quintuple des sommes encourues.

Rappelons qu'une fois les PV radars, ou les PVE, soit les nouveau PV électroniques, reçus par La Poste, un chef d'entreprise a théoriquement trois options :

  • 1. Payer la contravention soit parce qu'il était bien le conducteur du véhicule au moment des faits, soit parce qu'il est incapable de savoir à ce moment précis quel salarié était au volant. Une option alors à éviter dans ce dernier cas, dès lors que l'infraction incriminée est passible d'un retrait de point(s), notamment donc quand les PV émanent des radars automatiques ! Car une fois l'amende encaissée, sans contestation, c'est bien le permis de conduire du chef d'entreprise qui pourrait être amputé des points correspondants. En pratique, il arrive bien souvent que l'administration se montre incapable - en tout cas de manière automatisée - de relier le représentant légal d'une société à son numéro de permis de conduire. De fait, nombreux sont les dirigeants ayant payé l'amende minorée qui ne sont ensuite jamais inquiétés par la perte de points. Mais pas toujours non plus ! Et nombre de patrons se sont aussi retrouvés sans permis du jour au lendemain, sans bien comprendre ce qu'il s'était passé. Seule solution pour éviter cela, contester la contravention (voire notre troisième option ci-dessous).
  • 2. Dénoncer le salarié qu'il considère responsable de l'infraction. Rien n'empêchera d'ailleurs ce dernier de contester à son tour le PV s'il considère que c'est une erreur... En attendant, en fournissant ainsi les « renseignements permettant d'identifier l'auteur véritable de l'infraction », le représentant légal échappe bien entendu au retrait de point(s) éventuel, mais surtout au paiement de l'amende encourue (article L121-2 du code de la Route).
  • 3. Contester la contravention. Il n'était pas au volant et ne sait lequel de ses salariés l'était... Conséquence, il devrait bientôt être cité à comparaître devant le tribunal compétent pour s'en expliquer. Dans un tel cas de figure, il faudra donc veiller à ce que les sommes demandées à la barre correspondent bien à celles réclamées aux personnes physiques et non aux personnes morales (multipliées par cinq). Et dans un tel cas de figure, il est à noter qu'il n'aura en aucun cas à subir de retrait de point(s).

Les barèmes des contraventions

Voici la grille classique des amendes à régler en matière d'infraction routière, selon la classe de la contravention écopée :

Contravention

Taux minoré

Taux normal

Taux majoré

Peine maximale encourue au tribunal

1ère classe


11€ (17€ pour le station-nement)

33€

38€

2ème classe

22€

35€

75€

150€

3ème classe

45€

68€

180€

450€

4ème classe

90€

135€

375€

750€

Les contraventions de 5ème classe ne peuvent pas bénéficier du régime de l'amende forfaitaire, le passage au tribunal est automatique.

Contravention

Amende maximale

Peine maximale prononcée par le tribunal

5ème classe

1.500€

1.500€


 

Tous les sujets de la rubrique

Sur le même sujet...

En direct de la loi - Radars : les points ne seraient jamais retirés avec les véhicules de société, vrai ?

En direct de la loi - Radars : pourquoi le Préfet Debacq devait lui-même payer les PV reçus à l’Antai ?

En direct de la loi - Radars automatiques (PV au vol ou vidéoverbalisation)… Pas vu, parfois pas pris du tout !

En direct de la loi - Radar automatique : dénoncé à tort par son employeur comme le conducteur du véhicule flashé, que faire ?

En direct des tribunaux