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Radars 2018 : 2,5 M de flashs et 150 M d'euros en moins !

Dans Pratique / Radars

Stéphanie Fontaine

La baisse est "sans précédent", confirme la Cour des Comptes à propos des recettes des radars en 2018. Mais selon elle, celle-ci ne serait pas le simple fait du vandalisme des automates, mais peut-être bien d'un changement de comportement sur la route… Qui l'eut cru ? Décryptage de cette grande analyse financière annuelle sur les amendes de circulation.

Radars 2018 : 2,5 M de flashs et 150 M d'euros en moins !

Et si la diminution de la mortalité routière et le recul des recettes des amendes radars provenaient tout simplement d'un comportement plus vertueux des conducteurs ? En voilà une idée bien peu développée ! La Cour des Comptes en fait l'hypothèse dans son analyse financière sur le budget de l'État, rendu public mardi. "Si l’impact de la destruction des radars en fin de période est manifeste, la diminution de recettes est observée toute l’année et pose la question d’éventuels changements vertueux de la conduite des automobilistes", dixit la Cour.

À l'appui de ces explications, elle reprend l'évolution, mois par mois, du produit des amendes en 2018 (voir tableau ci-dessous). Au cours du premier semestre, alors que le 80 km/h, certes annoncé, n'est pas encore entré en vigueur, le chiffre d'affaires des automates est déjà en net recul de 16 %, soit presqu'autant qu'au cours de la seconde moitié de l'année (-17 %). "Sur un différentiel de recettes de 139,20 M€ entre 2017 et 2018, le premier semestre représente 45 % des pertes", précise encore la Cour. "Il ne semble pas que cette diminution soit uniquement conjoncturelle, liée à la destruction des radars", insiste-t-elle.

Produit mensuel des amendes forfaitaires des radars en millions d'euros (Md'€)

Mois

2017

2018

Écart en Md'€

Écart en %

Janvier

61,33

58,08

-3,25

-5 %

Février

58,07

49,54

-8,53

-15 %

Mars

71,8

52,73

-19,07

-27 %

Avril

67,17

51,82

-15,35

-23 %

Mai

65,36

48,78

-16,58

-25 %

Juin

64,68

64,9

0,22

0 %

1er semestre

388,41

325,85

-62,56

-16 %

Juillet

68,97

65,9

-3,07

-4 %

Août

73,53

66,82

-6,71

-9 %

Septembre

73,71

66,37

-7,34

-10 %

Octobre

86,21

63,63

-22,58

-26 %

Novembre

71,79

59,8

-11,99

-17 %

Décembre

61,85

37,32

-24,53

-40 %

2e semestre

436,06

359,84

-76,22

-17 %

Total

824,49

682,7

-139,22

-17 %

Source : Cour des comptes d’après données DGFIP

Et pour finir, elle confirme ce que l'on savait déjà : la "diminution sans précédent" en 2018 des recettes des amendes issues du contrôle automatisé, données à 864,3 millions d'euros (contre plus d'un milliard en 2017), en chute de 17,2 % pour ce qui est des seules amendes forfaitaires (voir tableau ci-dessous). Et alors, ce manque à gagner dont on a tant parlé, à combien s'élève-t-il ? Par rapport à 2017, ce sont donc 149 millions d'euros (amendes majorées incluses) qui ont été encaissés en moins ; par rapport à ce qui était attendu, ce sont près de 250 millions d'euros qui manquent, comme évoqué dans les estimations souvent avancées jusque-là.

Sauf que ce qui était attendu pour 2018 paraissait bien mal estimé, sous-entend la Cour des Comptes dans son analyse financière, surtout après deux années de recettes records (en 2017 et 2016), et alors même que le nombre de radars était, selon ce que nous avons pu déjà en juger, en diminution par rapport à l'an dernier, ou au mieux stable. Or, comme on le sait, la rentabilité des radars a tendance à décroître dans le temps, sauf changements : changement de place (comme pour les radars chantiers), multiplication des points de contrôle (avec l'arrivée de nouveaux appareils), ou encore changement de limitation de vitesse autorisée, ce qui fut le cas en 2018 (voir plus bas)…

Quant au coût du vandalisme, il a fortement augmenté. Les dépenses de réparation liées à la destruction des radars sont passés de 9,3 millions d'euros en 2017 (déjà bien en hausse par rapport à 2016) à 23 millions d'euros en 2018 (+155,5%) !

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Une manne toujours intéressante

Ceci étant dit, l'année 2018 reste malgré tout la troisième "meilleure" année depuis le lancement des radars automatiques en 2003, pour ce qui est des recettes engrangées.

Les recettes radars depuis 2013

Recettes en M€

2013

2014

2015

2016

2017

2018 (ce qui était attendu)

Écart en M€

Écart en %

Radars automatiques

708,3

740,1

789

920,3

1 013,2

864,3 (1 113)

-148,9

-15 %

dont amendes forfaitaires

579,3

611,7

642,2

760,5

824,5

682,7 (928)

-141,8

-17 %

dont amendes majorées

129

128,4

146,8

159,8

188,7

181,6 (185)

-7,1

-4 %

Hors radars automatiques

889,2

822,7

818,7

897,6

965

886,6 (720)

-876,4

-91 %

dont amendes forfaitaires

568,3

527,8

534,9

597,5

673,8

534,4 (407)

-139,4

-21 %

dont amendes majorées

320,9

294,9

283,8

300,1

291,20

352,2 (313)

61

21 %

Recettes totales

1 597,50

1 562,80

1 607,70

1 817,9

1 978,20

1 750,9 (1 877)

-227,3

-11 %

Source : selon les données de la direction du Budget

Quant à la réforme du stationnement, entrée en vigueur au 1er janvier 2018, elle a certes induit une diminution des recettes (puisque ce sont les villes qui récupèrent désormais directement celles du stationnement payant), mais moins que prévu. La Cour des comptes nous apprend qu'il y a eu l'an dernier 7,8 millions de forfaits de post-stationnement, ces FPS qui ont remplacé les amendes de stationnement à 17 euros, et 1,9 millions de titres exécutoires – entendez quand les FPS sont majorés, car non réglés dans les délais.

Selon les données officielles, 564 des 800 communes qui appliquaient le stationnement payant, sont entrées dans la réforme, ce qui signifie qu'il y en a quand même 236 qui ont abandonné le stationnement payant, à proprement dit ! À la place, les communes ont pu développer ce que l'on appelle la zone bleue, c'est-à-dire proposer des places gratuites, mais limitées dans le temps.

En cas de non-respect de cette durée maximale autorisée, le stationnement devient gênant, et la sanction reste pénale, avec une amende à 35 euros. Et ces amendes générées ne vont pas directement dans les caisses des villes, contrairement aux FPS… Ce qui forcément complexifie encore la situation, selon la cour des Comptes (voir plus loin).

Pas de panique. Selon les calculs du Budget, le solde cumulé par ces amendes routières, bien qu’en diminution en 2018, reste par construction élevé, puisqu’il traduit les écarts cumulés entre les consommations réalisées et les recettes encaissées depuis l’instauration de ce compte budgétaire, qu'on appelle "Compte d'affectation spéciale (CAS)", en l'occurrence, on le surnomme le "CAS radars", même s'il ne correspond pas qu'aux amendes générées par les automates.

En clair, le matelas reste confortable (voir tableau ci-dessous)…

Soldes budgétaire et cumulé (2015-2018)

En million d'euros

2015

2016

2017

2018

 

Recettes

1 329

1 421

1 528

1 462,90

 

Dépenses

1 286

1 342

1 362

1 466,40

 

Solde budgétaire

43

79

166

-3,5

 

Solde cumulé

799

878

1 043

1 039,50

 

Source : Direction du budget

Plus de flashs sur les routes à 80

Autre information distillée par la Cour dans son analyse financière : le taux de disponibilité des radars a commencé à diminuer dès le début de l’année 2018, et pas seulement à compter du mouvement des gilets jaunes, même si ça s'est certes fortement aggravé à partir de novembre. Pour autant, cette baisse de la disponibilité des radars "ne suffit pas à expliquer la diminution des recettes constante en 2018 et constatée dès le début de l’année 2018", répète la Cour. Car, le nombre de messages d’infraction anticipé - 30,77 millions de flashs étaient attendus en 2018, contre un peu plus de 26 millions en 2017, année déjà record pour rappel - "s’avère bien supérieur" au réalisé (23,77 millions), et ce, "malgré une augmentation constatée de verbalisation à l’été 2018 sur les routes bidirectionnelles limitées à 80 km/h".

"La soutenabilité du CAS pourrait devenir plus aléatoire si la politique de sécurité routière se traduisait par une évolution vertueuse des comportements des usagers de la route, entraînant une forte diminution des infractions, ou si à l’inverse, l’acceptabilité du contrôle automatisé de la vitesse venait à se retourner de manière significative", avait analysé la Cour l'an passé, dans sa précédente analyse. "Il n’est pas impossible que ces deux hypothèses apparemment contraires se soient vérifiées simultanément en 2018. En effet indépendamment de la dégradation des radars, certaines données témoignent d’un comportement plus vertueux des conducteurs", soutient la Cour, qui donne en exemple l'instauration de la nouvelle infraction "de non-désignation d'un conducteur" à bord d'une voiture de société, dont Caradisiac a tant parlé, et qui pose toujours d'indéniables problèmes juridiques, et financiers aux entreprises, qui se retrouvent avec des amendes énormes, en fonction du nombre de PV reçus – la contravention pour non-désignation n'étant pas à moins de 450 euros.

Combien ont rapporté les PV pour "non-désignation" ?

La Cour ne donne aucune idée, ni aucune estimation des recettes produites par ces nouveaux PV de non-désignation de conducteur (NDC). Mais elle rappelle que la mise en place de ces contraventions a provoqué une diminution des infractions relevées avec ces véhicules d'entreprise, de l'ordre de 10 %. Or, pour la Cour des Comptes, cette baisse comme les conséquences d'autres éléments factuels tel que le retard de déploiement de nouveaux radars (les radars tourelles, et la généralisation à quatre régions de l'externalisation des voitures radars, qui n'a été effective que dans une seule, en Normandie), auraient pu et dû être anticipées par la Sécurité routière, ce qui n'a pas été le cas, puisque celle-ci attendait carrément près de 20 % de flashs supplémentaires par rapport à 2017 !

Pour le reste, la Cour des comptes réitère ses critiques sur la complexité de ce compte d'affectation spécial (CAS) dit "radars", créé, rappelle-t-elle, en 2006, dans le budget de l'État, pour rendre l'usage de l'argent récupéré des radars transparent. Mais selon elle, ce n'est toujours pas le cas, et sur plusieurs points, ce CAS déroge toujours à la loi budgétaire. La situation, selon elle, se serait donc même aggravée :

1 - La Cour souligne "depuis plusieurs années la complexité du CAS, qui ne répond pas à l’objectif initial de lisibilité", car non seulement une partie des amendes n'est toujours pas affectée au compte (16,5 %), mais celui-ci ne retrace pas non plus toutes les dépenses effectuées au titre de la Sécurité routière, évaluées en 2017 à 3,663 milliards d'euros, soit plus du double des recettes des amendes routières encaissées en 2018 (1,75 milliard d'euros) ! Conclusion de la Cour : "La stricte analyse des recettes et des dépenses du CAS ne peut donc suffire à évaluer les recettes et les dépenses de sécurité routière ni même les recettes et les dépenses issues de la verbalisation des infractions routières."

2 – La décision d'affecter les recettes issues de l’abaissement de la vitesse à 80 km/h à un nouveau bénéficiaire, le "fonds de modernisation des établissements publics et privés FMEPP), contribue "à accentuer" cette complexité.

3 – Comme dit plus haut, la réforme du stationnement ne simplifie pas les choses, avec des amendes qui restent pénales dans certaines villes, tandis que d'autres ne le sont plus ni ne rentrent dans le périmètre de ce CAS…

4 – Une partie des amendes - 45 millions d'euros dans le budget général, près de 490 millions pour le désendettement de l'État, soit 30 % des recettes totales - n'a rien à voir avec l'amélioration de la sécurité routière. Comme les années précédentes, critique la Cour, l'architecture budgétaire n'est donc pas conforme à la loi, qui prévoit en son article 21 que "que les comptes d'affectation spéciale retracent des opérations budgétaires financées au moyen de recettes particulières qui sont, par nature, en relation directe avec les dépenses concernées".

Une transparence sur les amendes routières très aléatoire

À côté de cela, il y a aussi toujours une bonne partie des amendes dont on ne sait pas vraiment ce qui en est fait ! Le rapport sur "l’utilisation par l’agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) et par les collectivités territoriales" des ces amendes - un rapport annexé désormais chaque année au projet de loi de Finances - "ne répond pas pleinement" à cet objectif de transparence. Ce n'est pas parce que l'AFITF a dépensé 811 millions d'euros en faveur d'infrastructures routières, en 2017, alors qu’elle n'a récupéré "que" 405,5 millions d'euros en provenance des amendes routières, que nécessairement ces investissements visent "spécifiquement la lutte contre l’insécurité routière", note la Cour. "Une analyse des investissements réalisés en regard des routes les plus accidentogènes aurait apporté plus de crédibilité à cette conclusion."

Quant à l'usage qui est fait de la part affectée aux collectivités territoriales, il n'est pas plus clair. C'est même peut-être pire, puisqu'il y en a 85 %, dont on ne sait absolument pas ce qu'ils sont devenus. Le rapport susmentionné ne concerne que "les communes de moins de 10 000 habitants, qui représentent moins de 15 % des crédits attribués", rappelle comme chaque année la Cour. Une première évolution est toutefois attendue en 2019 puisque les prochaines notifications des montants de recettes qui seront attribuées aux communes de plus de 10 000 habitants seront accompagnées normalement d'une mention demandant explicitement un retour à la préfecture de l'utilisation des recettes. On attend de voir, comme on dit !

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