Si la Giulietta d’aujourd’hui frappe par l’audace de son style et l’agressivité de sa posture, rien de tel pour la première du nom. Courte, étroite, dotée d’une haute ceinture de caisse, de petites vitres, de gros phares ronds, comme exorbités, la Giulietta Berlina dégage une allure bonhomme, bien plus joviale qu’impressionnante. Etroite, elle n’en est pas moins présentée comme une familiale, sûrement eu égard à ses 4 portes. Succédant en 1955 à la belle, mais encore artisanale Alfa 1900, elle est la première Alfa Romeo a être construite de façon véritablement industrielle. Ainsi, elle démocratisera la marque, ses concepteurs ayant veillé à ce qu’elle ne soit pas beaucoup plus chère que ses principales concurrentes. Pourtant, elle dispose déjà d’un innovant 1300 cm3 en alliage léger, de deux arbres à cames en tête, d’un vilebrequin à cinq paliers, d’une culasse cross-flow… Du jamais vu à l’époque sur une si petite auto ! Cette propulsion (of course !) avait une boîte accolée au moteur, un pont rigide, 4 rapports synchronisés avec, au début, la commande au volant, et son freinage était assuré par quatre tambours.

La première mouture de ce modèle mythique, dite Giulietta « normale », arbore néanmoins un habitacle des plus dépouillé. C’est qu’il faut bien restreindre les coûts de production si l’on veut en limiter le prix de vente ! Ainsi, la planche de bord est en métal peint, le volant est en bakélite, et il n’y a pas de compte-tours. Avec son carburateur simple-corps et ses 50 ch, la Giulietta titille les 130 km/h, puis les 135 km/h lorsque la puissance passe à… 53 ch ! En 1959, la Giulietta phase 2 dispose d’une planche de bord habillée et d’une nouvelle calandre, puis, en 1961, le moteur s’enhardit jusqu’à 62 ch et 140 km/h. L’année suivante sonne le glas de la Giulietta de base, la carrière du modèle reposant alors sur la seule Giulietta TI (Tourisme International), une version beaucoup plus sportive, lancée depuis 1957. Forte, dans un premier temps, de 65 ch, la TI voit en 1961 la puissance de son 1300 cm3 atteindre 75 ch. A l’époque, cela lui assure le statut de sportive, son levier de vitesses étant désormais au plancher (le must !). Capable d’atteindre 155 km/h, engagée dans de nombreuses compétitions routières, la Giulietta TI se vend deux fois plus que la Giulietta « normale ». De fait, elle restera à jamais celle qui aura impulsé le grand élan industriel d’Alfa Romeo, permettant à sa remplaçante, l’Alfasud, de connaître un succès planétaire.

Hormis son nom, la Giulietta actuelle n’a bien sûr plus grand chose à voir avec la TI, à commencer par sa transmission aux roues avant. Ceci ne l’empêche pas d’être considérée comme l’une des plus audacieuses, des plus élégantes et des plus sportives des berlines d’aujourd’hui. Cette réputation-là… Quelque chose nous dit que le souvenir de la TI de 1962 n’y est pas tout à fait étranger.