
Le gouvernement vient d’annoncer qu’il comptait récolter plus d’un milliard d’euros avec les seuls radars automatiques en 2021, ce qui peut paraître excessif. Ou il faudrait être assuré que le système fonctionne à plein régime, avec un nombre bien plus important qu’aujourd’hui de radars déployés, et surtout un contexte sanitaire complètement résorbé, ce qui semble pour l’heure loin d’être gagné. Déjà cette année, comme pour les précédentes, il sera certainement loin du compte. Vu les chiffres confidentiels de la verbalisation automatisée que Caradisiac a pu consulter, on voit mal comment en effet les recettes des radars pourraient s’approcher en 2020 des 911 millions d’euros escomptés.
Ce ne serait pas vraiment une surprise, vu le potentiel impact de la crise sanitaire sur le trafic routier, notamment durant le confinement du 17 mars au 11 mai, mais cela semble se confirmer. Selon les statistiques internes au ministère de l’Intérieur sur lesquelles Caradisiac a mis la main, le nombre de PV dressés via les radars automatiques est en forte baisse sur les huit premiers mois de 2020. Il n’y en a même pas eu 8 millions entre janvier et août ! À ce rythme, cela pourrait en faire moins de 12 millions sur l’ensemble de l’année, soit encore moins qu’en 2019, et surtout beaucoup moins que les précédentes années.
Les chiffres des radars (2014 - 2021)

Dans ces conditions, les recettes seront certainement bien moindres que les 911 millions d’euros initialement prévus. Ce probable nouveau plantage n’a semble-t-il pas incité le gouvernement à faire preuve de la plus grande prudence pour son budget 2021. L’exécutif vient en effet d’annoncer qu’il comptait sur des recettes radars en forte hausse l’an prochain. Il table ainsi sur plus d’un milliard d’euros (repris dans le tableau ci-dessus), avec plus de 800 millions d’euros via les contraventions payées dans les temps (ce que l’on nomme les « amendes forfaitaires »), plus quelque 200 millions d’euros avec les amendes qui ne sont pas réglées dans les temps et qui sont en conséquence majorées.
Des radars moins rentables ? Pas vraiment…
Le niveau escompté pour 2021 n’est pas tout à fait celui du record de 2017 (cette année-là, ce sont 1 013 millions d’euros qui avaient été récoltés avec le système automatisé), mais il n’en est vraiment pas loin. Pourtant un tel pronostic peut d’ores et déjà paraître excessif, vu le contexte sanitaire persistant - et qui pourrait potentiellement persister sur une bonne partie de 2021 – et, même sans cela, vu le retard accumulé sur le programme d’installation des nouveaux radars.
Comme Caradisiac a déjà eu l’occasion de le soulever, c’est la raison principale de la baisse des recettes enregistrées ces dernières années. Il ne s’agit aucunement d’une chute particulière de la rentabilité du système. C’est juste qu’avec moins de radars, c’est logique, moins d’argent rentre dans les caisses du Trésor public. Or, le parc d’aujourd’hui n’équivaut même pas à celui de 2012, selon le décompte auquel Caradisiac a eu accès (voir ci-dessous). Au 1er octobre, selon celui-ci, il y a moins de 4 000 radars déployés, et il paraît donc déjà peu probable qu’il pourra y en avoir 4 400 en place d’ici la fin de l’année, comme prévu.
Année - Période / Type de radars | 2019 | Exclusif - Le décompte au 1er oct 2020 | Ce qui est programmé pour fin 2020 | Ce qui est programmé pour fin 2021 |
Radars fixes | 1 291 | 1 085 | 1 000 | 1 000 |
Radars discriminants | environ 400 | environ 400 | 400 | 400 |
Radars tronçons | 99 | 99 | 62 | 72 |
Radars tourelles | environ 345 | environ 530 | 1 200 | 1 200 |
Radars urbains | non encore déployés | 7 | NC | 500 |
Radars autonomes (ou chantiers) | 249 | 246 | 250 | 250 |
Radars embarqués | 501 | 501 | 480 | 450 |
Voitures radar | 449 (dont 26 externalisées) | 381 (dont 84 externalisées) | 480 (dont 160 externalisées) | 450 (dont 223 externalisées) |
Radars feu rouge | 680 | 650 | 450 | 300 |
Radars Passage à niveau | 78 | 76 | 78 | 78 |
Total | 4 094 | environ 3 980 | 4 400 | 4 700 |
Source : selon le dernier bilan des infractions de la Sécurité routière, les données des derniers projets de loi de Finances, et les informations exclusives de Caradisiac.
Alors que leur nombre ne devait cesser de progresser après les décisions du comité interministériel de la sécurité routière (CISR) de 2015, dont l'objectif était notamment d'en installer 4 700 d'ici la fin 2018, le parc de radars n'a en fait pas arrêté de diminuer. En 2016 et 2017, il a bien commencé par s’étoffer, mais toujours un poil en deçà des buts fixés (voir notre premier tableau ci-dessus). Ensuite, c’est allé de mal en pis, et l'objectif des 4 700 radars déployés, dont le gouvernement assure qu’il sera désormais atteint l’an prochain, n'a jamais cessé de s'éloigner…
À parc équivalent, recettes plutôt en hausse
En 2019, le nombre de radars en service était inférieur à celui de 2014 (4 094 automates contre 4 122). Pour autant, les recettes engrangées ont été légèrement supérieures (près de 760 millions d’euros contre à peine plus de 740). Preuve que, contrairement à ce que l’on pourrait laisser croire, la rentabilité du système ne cesse de s’améliorer.
Où ces points d’amélioration sont-ils alors recherchés ? Dans les changements…
- Les changements de paramétrages des machines. Les radars fixes peuvent être par exemple « améliorés » avec l’ajout de l’option « double sens », permettant de contrôler non plus un seul sens de circulation, mais les deux existants sur une route bidirectionnelle.
- Les changements de vitesse limite autorisée à la hauteur des équipements. Abaisser la limitation de vitesse, c’est une recette qui marche à tous les coups pour détecter davantage d’infractions ! C'est ce qui s'est d'ailleurs produit l'an dernier pour la cabine considérée comme la plus active de France, implantée sur l'autoroute A8 à Cagnes-sur-Mer, dans le sens de Nice vers Cannes. En 2019, la vitesse y a été abaissée de 110 à 90 km/h, ce qui a entraîné un boom de près de 80 % des excès de vitesse enregistrés.
- Les changements de machines. Les cabines classiques sont en ce moment remplacées par des radars tourelles, et bientôt les radars feu rouge le seront par des radars urbains. Dans les deux cas, il s'agit d'équipements multi-infractions, théoriquement capables de déceler aussi bien les excès de vitesse, que les franchissements illégaux aux feux de signalisation… Mais pas que ! À l'avenir, ils devraient même pouvoir relever d'autres infractions, comme la détection du portable au volant, la ceinture non attachée, entre autres, ce qui reste toutefois à confirmer. D'une manière générale, ces nouveaux radars sont en tout cas considérés comme plus performants que les anciennes générations.
Toute chose égale par ailleurs, la rentabilité d’une machine a sinon bel et bien tendance à décroître. D’où tous ces changements et ces évolutions incessantes. Sans compter que lorsque les radars ne sont pas abîmés, leurs photos sont théoriquement de mieux en mieux exploitées au Centre de Rennes, où sont traités tous les clichés. Ceux-ci ne deviennent pas systématiquement de véritables PV, encore faut-il qu'ils soient exploitables, et là aussi des marges de progrès sont à trouver. Enfin, la cerise sur le gâteau, c'est d'avoir en plus un parc en augmentation : plus y en a, plus il y a de PV, plus les recettes progressent ! Sauf que depuis presque trois ans, c'est donc tout l'inverse qu'il se passe.
Un parc en déclin depuis 2017, à qui la faute ?
Le nombre de radars chantiers devait s'accroître à 500 unités, pour finir il devrait rester stable à 250. Dès cette fin d’année (voir notre second tableau ci-dessus), il devait y avoir 1 200 radars tourelles déployés, mais on n'en serait même pas à la moitié… Dans les documents budgétaires de l’État, il est aussi indiqué que « l'expérimentation » des radars urbains correspondra fin 2020-début 2021 au déploiement de « 100 cabines » - entendez des leurres, c’est-à-dire des cabines qui ne sont pas forcément et systématiquement équipées d’un vrai radar à l’intérieur -, ce qui représentera "20 radars opérationnels"… Mais là encore, il y a de quoi s'interroger sur ce qui sera réellement fait.
La vague de vandalisme de l’été 2018 au printemps 2019 est-elle la seule responsable de ce retard ? À en croire la Cour des Comptes, ces dégradations (qui ont d'ailleurs tendance à se poursuivre à un niveau élevé même avec la dispersion du mouvement des gilets jaunes) n’expliquent pas tout. Il y aurait aussi, voire surtout, « des motifs techniques » à cela - c’est ce qui expliquerait par exemple la mise en place tardive des radars tourelles dont l’homologation a traîné - et des motifs « juridiques ou politiques » pour ce qui concerne par exemple l’externalisation de la conduite des voitures radar – celles-ci étant progressivement retirées aux gendarmes et policiers, pour être confiées à des entreprises privées.
Même la ministre Élisabeth Borne, tout début 2019, alors qu’elle était chargée des Transports a reconnu que les recettes radars étaient devenues « une ressource fluctuante (…) avant même la crise des gilets jaunes », comme en témoigne ce court extrait repris de la chaîne Public Sénat.
En marge des discussions parlementaires sur la Loi d'Orientation des Mobilités (LOM), elle déclarait surtout qu’on « ne peut pas considérer que l'insécurité ou l'incivilité routière soient des sources de financement naturel du budget de l'État », en particulier quand « on souhaite [leur] réduction »… C’était il n’y a même pas deux ans. Force est de constater cependant que l’État compte toujours autant sur cette « ressource fluctuante » pour boucler son budget, et même qu’il n'hésite pas à la surestimer quand il semble que cela lui soit nécessaire… Car sinon comment expliquer que ces estimations tiennent aussi peu la route ?
L'évolution des recettes depuis 2017 et les surestimations gouvernementales
Année / Recettes |
2017 |
2018 |
2019 |
Ce qui a été vraiment encaissé en millions d'€ |
1 013 | 864 | 760 |
Ce qui était prévu en millions d'€ |
991 | 1 113 | 1 230 |
Soit une différence de… |
2 % | -22 % | -38 % |
Source : selon les documents budgétaires de l'État
Pour les recettes de 2018, quand l'exécutif s’est trompé de plus de 20 %, on pourrait considérer que c'est parce qu'il s'est laissé surprendre par la crise des gilets jaunes. Mais en 2019, comment expliquer qu'il ait pu de nouveau se planter, de près de 40 % cette fois ? Cette année, il pourra toujours rejeter la faute sur la pandémie de Coronavirus, mais qu’en sera-t-il l’an prochain ? Les paris sont ouverts…
Nos précédents articles sur le sujet :
Quels sont les radars les plus flasheurs en France ? Mystère…
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Par Rodger29
Du pognon pour Macron !
Par beniot9888
En réponse à Rodger29
Du pognon pour Macron !
Parce que tu crois que ça tombe dans sa poche ? Il n'est pas payé plus quand tu te prends une prune.
Mais par contre, ça vient enrichir le budget de l'état.
Bref, on te remercie tous pour ta contribution.
Par Axel015
En réponse à Rodger29
Du pognon pour Macron !
Il faut bien financer les associations salafistes.
Par SUDISTE DES LANDES
respecter la limitation & tout ira bien ! pas un copek pour l'etat simple non
sinon vous avez samcam ou radarbot -)..pas besoin de coyote qui cout une blinde W&S
Par GigaFocus
Ce qui est absolument dégueulasse dans cette affaire, est tout d'abord que l'État compte boucler son budget avec les amendes, que ce soit pour excès de vitesse ou stationnement ou n'importe quoi. Ce système ultra pervers, fondé sur l'espérance qu'une majorité de Français franchira la limite et qu'ils seront punis pour cela, n'existe dans aucun autre pays au monde. Ailleurs, les éventuelles recettes arrivent en plus et en dehors de ce qui a été budgété, un bonus en quelque sorte. Mais en aucun cas un budget digne de ce nom devrait intégrer ces recettes. Et cette drôle de conception du budget de l'État est évidemment à l'origine de tout ce délire de radars mais aussi des amendes pour non-port du masque et je ne sais quoi. Il est plus que temps qu'une nouvelle génération de politiciens arrive au pouvoir (et dégagent Macron, toute sa clique et ses préfets par la même occasion) et cassent ce système, tant qu'à faire aussi le financement de la ligue fasciste de Perrichon et les lois scélérates qu'il a fait voter. Il faut comprendre que les boîtes qui fabriquent ces radars touchent un bon tiers des amendes récoltées et sont, comme par hasard, dirigées par d'anciens directeurs de cabinet et autres "aides de camp" qui pantouflent dans le privé après leur mandat dans le public et font donc perdurer ce système dément pour se goinfrer toujours plus d'argent public, dont on peut être sûr qu'une partie finira dans un paradis fiscal quelconque.
Par GigaFocus
En réponse à GigaFocus
Ce qui est absolument dégueulasse dans cette affaire, est tout d'abord que l'État compte boucler son budget avec les amendes, que ce soit pour excès de vitesse ou stationnement ou n'importe quoi. Ce système ultra pervers, fondé sur l'espérance qu'une majorité de Français franchira la limite et qu'ils seront punis pour cela, n'existe dans aucun autre pays au monde. Ailleurs, les éventuelles recettes arrivent en plus et en dehors de ce qui a été budgété, un bonus en quelque sorte. Mais en aucun cas un budget digne de ce nom devrait intégrer ces recettes. Et cette drôle de conception du budget de l'État est évidemment à l'origine de tout ce délire de radars mais aussi des amendes pour non-port du masque et je ne sais quoi. Il est plus que temps qu'une nouvelle génération de politiciens arrive au pouvoir (et dégagent Macron, toute sa clique et ses préfets par la même occasion) et cassent ce système, tant qu'à faire aussi le financement de la ligue fasciste de Perrichon et les lois scélérates qu'il a fait voter. Il faut comprendre que les boîtes qui fabriquent ces radars touchent un bon tiers des amendes récoltées et sont, comme par hasard, dirigées par d'anciens directeurs de cabinet et autres "aides de camp" qui pantouflent dans le privé après leur mandat dans le public et font donc perdurer ce système dément pour se goinfrer toujours plus d'argent public, dont on peut être sûr qu'une partie finira dans un paradis fiscal quelconque.
Les lois scélérates que l'actuelle majorité a fait voter
Par GigaFocus
En réponse à Axel015
Il faut bien financer les associations salafistes.
La "ligue contre la violence routière" est une association salafiste ? Car elle est financée par nos impôts et les fabricants de radars !
Par GigaFocus
En réponse à gignac31
Commentaire supprimé.
Je suis supposé porter le masque en ville... Mais ne le fais jamais.
Par GigaFocus
En réponse à gignac31
Commentaire supprimé.
Je suis supposé porter le masque en ville mais ne le fais nulle part.
Par Axel015
En réponse à GigaFocus
La "ligue contre la violence routière" est une association salafiste ? Car elle est financée par nos impôts et les fabricants de radars !
Non elle est pire tu as raison. Elle agit par vénalité, alors que les salafistes agissent par idéologie.
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