Pourquoi les constructeurs automobiles pourraient bien délaisser l’automobile
BILLET D’HUMEUR - Les ventes d’autos sont en berne et pourraient bien ne jamais retrouver les couleurs d’antan. Alors, les constructeurs seraient bien obligés de se diversifier et de produire autre chose que des voitures. Et plusieurs indices vont dans ce sens.

En ces temps de repos et de digestion d’entre deux fêtes, projetons-nous un instant en 2045. En ce matin de semaine, à peine réveillé, et de fort bonne heure, la cafetière Peugeot s’est mise en route. Le temps d’une douche, et d’un petit-déj trop rapidement avalé, on fonce vers la porte d’entrée, ou plutôt de sortie, non sans avoir salué Asimo 12, le robot Honda. En notre absence, il va gérer la maison, et donner ses ordres à l’aspirateur Hyundai, au frigo connecté MG, et à la tondeuse automatique Toyota.
Pour aller au bureau, ou une IA Tesla nous a préparé l’agenda de la journée et exécuté toutes les tâches qu’on n’a plus qu’à valider, on ne prend pas sa voiture. On s’y rend en vélo, en trottinette ou en transports en commun. De temps en temps, quand on est chargé, on appelle bien sûr une auto autonome via une appli. Pratique, elle déboule en deux minutes et nous emmène ou on veut. Une voiture perso ? On n’en a plus depuis 10 ans, les voisins non plus. Plus personne de notre entourage. Parait que ça existe encore, on a vu ça à la télé, dans une émission sur les collectionneurs d’objets anciens. Si ça nous manque ? Pas plus que la pellicule argentique; la K7 ou le CD.
La fin de l’auto individuelle ?
Évidemment, cette historiette est de la pure science-fiction, une histoire improbable. Et pourtant. Quel constructeur mondial, quel état de pays industrialisé ne mise pas aujourd’hui sur une baisse importante de la production automobile ? Quelle marque digne de ce nom table encore sur des chiffres de ventes annuels semblables à ce qu’ils étaient il y a dix ans à peine ? Et si l’avenir des constructeurs automobiles était ailleurs que dans l’automobile ?
Ce changement de direction, improbable jusqu’à ce XXIe siècle, est pourtant sérieusement envisagé. Et de nombreux indices le laissent penser, dans la vieille Europe, comme aux États-Unis et en Chine. Chez nous, les trois puissantes familles du continent auto, les Porsche, les Quandt (BMW), les Agnelli et les Peugeot (Stellantis) cherchent à placer les billes de leurs holdings familiales dans d’autres secteurs comme l’IA ou le luxe, beaucoup plus rentables.
De l’autre côté de l’Atlantique, il suffit d’observer le plan de rémunération qu’Elon Musk s’est concocté au cours de la prochaine décennie pour s’apercevoir qu’il n’y a pas que les autos dans la vie, ou sur son futur compte en banque. Les 1 000 milliards qu’il compte amasser ne dépendent pas seulement des ventes des futures Model X ou Y. Les robots-taxis sont entrés dans la danse de ses objectifs de vente, de même que les robots humanoïdes Optimus.

L’auto serait-elle devenue ringarde aux yeux des financiers ? En tout cas, pour ceux des géants de la tech, cela semble le cas. Google, mais surtout Apple, a renoncé à produire et à vendre des autos. Et pour cause. Lorsqu’on est habitué au business de l’Iphone et à ses 50 % de marge opérationnelle, on tique un peu lorsque les objectifs possibles dans l’industrie automobile ne dépassent pas 15 %. Et encore, ce pourcentage n’est valable que pour une marque au mieux de sa forme, hormis une pépite comme Ferrari
Les GAFAM et la cohorte des nouveaux milliardaires ne tournent pas le dos à l’auto pour autant. Mais préfèrent endosser le rôle de fournisseur, livrant ainsi des solutions techniques ou des cartes graphiques, à l’instar de Nvidia. Une position beaucoup plus prudente qui permet de ne pas placer ses œufs dans le même panier et de ne se risquer dans une industrie vieillissante comme l’auto du bout du pneu seulement.
Mais la Chine, alors ? Elle qui a tout chamboulé dans l’automobile mondiale ? Et qui en a retiré plus que des bénéfices : un étonnant soft power économique prouvant à toute la planète sa supériorité technologique. Elle aussi est en train de limiter les frais. Dans son nouveau plan quinquennal, Pékin change de cap. L’industrie auto n’est plus sa priorité, place à l’IA et à la robotique.
Une décision qui peut être lue de deux manières. La plus optimiste pour l’avenir de l’automobile consiste à se dire, en usant de la bonne vieille méthode Couë, que l’industrie automobile chinoise est aujourd’hui adulte et peut se débrouiller seule, sans subventions. Mais la plus pessimiste laisse penser que si Pékin jette le gant c’est que dans l’avenir, c’est que la tech est plus intéressante que l’automobile.
Un plan B pour l’industrie auto ?
C’est ainsi que Yin Tongyue, le président du groupe Chery et ses dix marques nous confiait, il y a quelques semaines, que dans 10 ans, dans l’entreprise qu’il dirige, seule 50 % de l’activité serait classiquement automobile.
Et pour cause, de l’Ademe en France, à l’École polytechnique de Montréal en passant par l’université du Michigan, toutes ces institutions prévoient un renforcement massif de l’autopartage et du renforcement des transports en commun, pour des raisons de prix prohibitifs et d’environnement.
Évidemment, au fin fond de la péninsule du nord Michigan comme dans les Cévennes, certains endroits ne seront jamais desservis par un RER, mais ce sont aussi les régions les moins peuplées, et CQFD, celles ou le client de l’auto se fait le plus rare. Les chercheurs le savent, et n’envisagent une réduction de la production automobile qui ne serait, dans 30 ans, « que » de 50 %. De quoi néanmoins inciter les constructeurs à trouver un plan B pour continuer d’exister.
















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